Goulags

Publié le 17 décembre 2007 Lecture : 2 minutes.

L’un des événements majeurs de l’année qui vient sera bien évidemment l’élection présidentielle américaine du 4 novembre 2008. Plus encore que le désordre irakien, deux sujets sont d’ores et déjà au cur de la campagne : l’immigration et l’insécurité – lesquels sont d’ailleurs liés dans l’esprit des électeurs. Or, sur ces deux plans, le malaise, pour ne pas dire plus, de la société américaine est profond. Dans sa livraison de cette semaine, notre confrère The Economist publie un sondage significatif : une large majorité des Américains perçoit les immigrés comme une menace pour ses propres valeurs, pour ses traditions et pour la préservation de l’emploi. Mais il y a plus inquiétant. Rendues publiques le 5 décembre et curieusement passées inaperçues, les statistiques du département de la Justice font froid dans le dos. La plus grande démocratie du monde est aussi la plus grande prison. Deux millions et demi de détenus sont incarcérés dans les prisons américaines, un chiffre en augmentation constante depuis dix ans et un taux record de 751 prisonniers pour 100 000 habitants. Soit beaucoup plus que des pays où l’emprisonnement est aussi une arme politique tels que la Libye (217 pour 100 000), l’Iran (212) ou la Chine (119). À titre de comparaison « démocratique », ce même taux est de 148 en Grande-Bretagne et de 85 en France. Société violente, mais aussi société malade de ses clivages raciaux. 60 % des détenus dans les prisons américaines entrent dans les catégories « Noir ou Afro-Américain » et « Hispanique ou Latino ». Dans l’Amérique de George W. Bush, qui sera peut-être demain celle de Barack Obama ou d’Hillary Clinton, le pourcentage de Noirs incarcérés est six fois plus élevé que celui des Blancs, et près de 10 % du total des hommes noirs âgés de 30 à 35 ans sont actuellement en prison. Dans les États où la population pénale est la plus nombreuse, comme le Texas, la Californie et la Floride, ce taux flirte même avec les 20 % ! On savait, depuis Guantánamo et Abou Ghraïb, que les arrière-cours de l’Amérique impériale n’étaient pas belles à voir. On sait désormais qu’un archipel de goulags aseptisés se cache dans ses cuisines.

Retrouvez François Soudan sur son blog « Courrier Sud » (http://soudan.blog.jeuneafrique.com)

la suite après cette publicité

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires