Convergence d’intérêts

Alors que le pays continue de nourrir des relations très étroites avec la France, la Chine populaire et la Libye ont le vent en poupe à N’Djamena.

Publié le 17 décembre 2007 Lecture : 2 minutes.

La petite histoire a longtemps animé les conversations des salons de N’Djamena. Alors qu’il se rend à la cérémonie d’investiture d’Idriss Déby Itno, qui vient d’être réélu pour un troisième quinquennat à la tête du pays, le président taïwanais, Chen Shui-bian, apprend dans son avion que N’Djamena vient de rétablir quelques heures auparavant, ce 6 août 2006, ses relations diplomatiques avec la République populaire de Chine. En clair, le Tchad rompt sans préavis ses liens avec la République de Chine (Taiwan). Amer, le chef de l’État taïwanais ordonne au pilote de rebrousser chemin.
Pourtant, en établissant des relations diplomatiques avec Taiwan, le 12 août 1997, au détriment de la Chine, le pays a bénéficié d’une aide annuelle de plus de 15 milliards de F CFA (22,9 millions d’euros) gracieusement versée par la République insulaire en quête de reconnaissance internationale. Des projets dans le domaine de l’éducation, de la santé et des infrastructures ont pu être menés à bien. Taipei a notamment financé des études de faisabilité en vue de la construction d’axes routiers visant à désenclaver le pays. Mais l’uvre la plus symbolique de cette coopération reste sans conteste le pont Taiwan érigé au-dessus du fleuve Chari. D’un coût de 3 milliards de F CFA, l’ouvrage a permis de désengorger le petit pont à une voie de Chagoua, qui supportait de moins en moins la circulation des personnes et des marchandises entre la capitale tchadienne et la ville camerounaise voisine de Kousseri.
Menacé par des rebelles financés par l’ennemi soudanais, lui-même soutenu par la Chine, N’Djamena a dû tourner le dos aux généreux Taïwanais pour opérer un retour stratégique vers la Chine continentale. Le pays n’a pas tout perdu pour autant. Cette normalisation a favorisé l’afflux d’entreprises chinoises au Tchad, dans des secteurs aussi variés que l’énergie, les mines, les télécommunications (avec Huawei Technologies, poids lourd chinois de la fourniture de réseaux), le bâtiment et les travaux publics, et même l’hôtellerie. Mais l’intérêt de Pékin réside surtout dans le pétrole : 25 % des importations pétrolières chinoises proviennent d’Afrique. En janvier dernier, le pétrolier canadien EnCana, qui a foré depuis 2002 onze puits dans le cadre de son programme d’exploration pétrolière au Tchad, a cédé ses actifs pour 202,5 millions de dollars à la China National Petroleum Corporation (CNPC), le premier groupe énergétique de Chine.
Le voisin libyen a, lui aussi, lancé une opération séduction au Tchad. Le pays de Mouammar Kadhafi, qui ne se contente plus de jouer les médiateurs entre le pouvoir de N’Djamena et les multiples groupes rebelles, a des intérêts économiques de plus en plus importants. La Libye est présente dans le capital de l’une des six banques en activité au Tchad, à savoir la Banque commerciale du Chari (BCC), au capital de 3 milliards de F CFA, codétenu par la Libyan Arab Foreign Bank et l’État à hauteur de 50 % des parts chacun. On s’active aussi du côté de la Libyan Arab Foreign Investment Company (Lafico), la branche chargée du capital-risque du groupe libyen, qui a achevé en décembre 2005 la construction d’un complexe hôtelier cinq étoiles de 177 chambres à N’Djamena. Lafico-Tchad en a confié la gestion au groupe hôtelier allemand Kempinski.

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