Le retour de l’enfant prodigue

Le fils aîné de feu le président Mobutu Sese Seko retourne à Kinshasa le 23 novembre. Et n’entend pas abdiquer toute ambition politique.

Publié le 14 novembre 2003 Lecture : 3 minutes.

Manda Mobutu, fils aîné de feu le président zaïrois Mobutu Sese Seko, sera dans l’avion de Kinshasa le 23 novembre. En exil depuis avril 1997 au Maroc d’abord, puis en Côte d’Ivoire et enfin à Paris, il estime qu’aujourd’hui sa vie et sa liberté ne sont plus en danger en République démocratique du Congo. Il part donc avec son épouse et avec l’une de ses jeunes soeurs, Yango. Ses cinq enfants resteront, pour le moment, à Paris.
« Le pouvoir n’a aucun intérêt à ce qu’il m’arrive quelque chose », estime-t-il, rappelant pourtant que son jeune frère Nzanga, rentré au pays depuis août 2003, ne se déplace qu’entouré de huit gardes du corps. Peut-on vivre éternellement de cette façon-là ? « Non, mais à mon avis la situation va changer. » Cette dernière remarque touche à la raison essentielle du retour de Manda au pays. Selon lui, le gouvernement de transition actuel, doté de quatre vice-présidents, est « invivable ». « Ce n’est pas dans nos coutumes d’avoir quatre chefs. Si, pour prendre une décision, il faut quinze jours de discussions pour que tout le monde soit d’accord, nous n’arriverons jamais à rien et il y aura toujours des semi-rébellions dans l’est du pays. »
Il s’apprête donc à prendre pied dans un domaine jamais tâté encore, celui de la politique. Sans pour autant se poser en sauveur de la patrie en danger, il ne cache pas ses opinions : « Le Congo mérite mieux que ce qu’il a aujourd’hui. » Il se prononce sans ambages en faveur d’un pouvoir central fort – capable de mettre les irrédentistes du Kivu au pas et pour une large décentralisation n’allant toutefois pas jusqu’au fédéralisme « propre à susciter des désirs d’indépendance, comme nous en avons eu dans les années 1960 ». Manda sait de quoi il parle, ces problèmes ont porté feu son père au pouvoir.
Pour lui, pas question de coup de force. Il s’agit avant tout de renforcer le Rassemblement national populaire (RNP) qu’il a fondé en 1999, et qui, l’année dernière, était considéré comme insuffisamment représentatif pour participer au Dialogue intercongolais. Les principaux viviers où recruter des militants se trouvent à Kinshasa, dans le Bas-Congo et dans le Kasaï. « Le pouvoir me prendra en considération s’il sent que j’ai une assise populaire derrière moi. Sinon, je ne serai qu’un Mobutu qui rentre au pays, et cela ne me suffit pas », affirme-t-il, discrète allusion à Nzanga.
Il promet donc d’aller sur le terrain, vers les jeunes en particulier, pour convaincre que ses idées ne relèvent pas d’un mobutisme passé de mode, mais sont porteuses d’espoir et de renouveau. « Mon atout est de bien connaître ce pays que j’ai parcouru jusque dans ses provinces les plus éloignées lorsque j’étais militaire. Je veux dire aux gens qu’il existe des moyens d’améliorer leur quotidien. » Manda Mobutu n’est pas – pas encore ? – un tribun et ne s’anime que lorsqu’il parle de ses compatriotes. « On peut désenclaver les quartiers pauvres de Kinshasa, apporter l’eau courante et l’électricité », le minimum vital pour transformer les sympathisants en militants et, mieux, en électeurs.
L’objectif in fine reste en effet les élections, prévues dans deux ans. Se voit-il président de la République ? « Tout dépend du système politique en place. Je n’ai pas envie d’être un président sans réel pouvoir. » Mais la route est encore longue, et il faudra compter les soutiens. « J’ai profité d’une partie du carnet d’adresses de mon père, mais il faut savoir que ses amis politiques d’hier ne sont pas forcément les miens aujourd’hui. »

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires