La Françafrique épargnée

Publié le 17 novembre 2003 Lecture : 2 minutes.

Depuis le 5 juillet 1996, date à laquelle Le Floch-Prigent a été mis en examen par la juge d’instruction Eva Joly, les responsables africains de certains pays pétroliers craignaient le pire. Plus l’enquête avançait, plus les langues se déliaient. Tarallo a brisé l’omerta devant la juge, en 2000, et le procès, qui ne portait que sur le dévoiement du système, a dévoilé dans les détails une « corruption légale » que personne (ni Elf, ni la France, ni les pays africains) ne voulait voir étalée sur la place publique. Chaque témoignage portait en lui le risque que « l’affaire Elf » devienne le procès de la Françafrique, comme l’avait peut-être voulu Eva Joly. Les aveux furent nombreux. « Les commissions revenaient à ceux que les chefs d’État désignaient, a expliqué Le Floch. Si jamais, à la fin, cela se termine dans un orphelinat, je suis très content, mais cela ne se termine pas toujours dans les orphelinats. » Et, comme on s’y attendait, les noms de plusieurs personnalités ou chefs d’État africains sont revenus fréquemment dans la bouche des prévenus : Omar Bongo, Denis Sassou Nguesso, José Eduardo Dos Santos, Paul Biya, Pascal Lissouba ou Jonas Savimbi.
Pourtant, le président du tribunal a tenu bon : s’il désirait que les prévenus s’expliquent sur le financement des États africains, c’était seulement pour pouvoir mieux déterminer les dérives qui pouvaient leur être imputées. Et, le 12 novembre, les dirigeants africains pouvaient respirer. En déclarant Tarallo coupable, ainsi que tous ceux qui s’étaient trouvé des « alibis africains », le tribunal sous-entendait que les chefs d’État n’étaient pas responsables des malversations, quelles que soient par ailleurs leurs responsabilités dans la gestion des pétrodollars. Non, a-t-il donc jugé, les comptes en Suisse, la villa en Corse et les millions détournés ne sont pas le fait de ce « mandant africain » derrière lequel Tarallo n’a cessé de se cacher, à savoir le président gabonais Omar Bongo. Même si les ombres de politiques de tous bords et de toutes nations ont plané sur l’affaire, le procès Elf n’a pas débordé de son cadre purement juridique.

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