Milton Obote

L’ancien président ougandais est décédé le 10 octobre à Johannesburg.

Publié le 17 octobre 2005 Lecture : 3 minutes.

Il était l’un des derniers « pères » des indépendances africaines chèrement gagnées dans les années 1960. Apollo Milton Obote, premier président de l’Ouganda indépendant, est mort d’une maladie rénale dans un hôpital de Johannesburg, le 10 octobre. Il avait 80 ans. Il vivait en exil en Zambie depuis 1985, date à laquelle il a été renversé par le commandant en chef de son armée, le général Tito Okello, et le brigadier Bazilio Olara Okello. Le Conseil militaire qu’ils forment alors ne résiste pas un an à l’avancée de la guérilla conduite par l’actuel président, Yoweri Museveni. Ce dernier, eu égard à la personnalité d’Obote, a décidé de lui accorder des funérailles nationales.

Car l’homme était un « personnage ». Dernier survivant, avec le Zambien Kenneth Kaunda, des cinq Africains de l’Est à avoir arraché leur indépendance aux Britanniques – les trois autres étant Hastings Banda au Malawi, Julius Nyerere en Tanzanie et Jomo Kenyatta au Kenya -, il est le premier à avoir regagné le pouvoir par les urnes, en 1980, neuf ans après en avoir été chassé. Mais ce n’est pas le seul « exploit » à mettre au compte de ce fils de chef, né le 28 décembre 1924 à Akoroko, au sein de la tribu Langi, installée dans le nord de l’Ouganda. Les Nordistes étaient considérés comme « arriérés et sans éducation », mais le statut social de Milton Obote lui avait permis de faire des études. Devenu un jeune instituteur ambitieux, il fait son apprentissage politique au Kenya, avant d’entrer dans l’administration coloniale. En 1960, il fonde le Congrès du peuple ougandais (UPC), un parti composé de plusieurs ethnies minoritaires. Deux ans plus tard, à l’indépendance, il devient Premier ministre, abandonnant le rôle de chef de l’État – purement honorifique – au roi Mutesa II, de la puissante ethnie majoritaire buganda. En 1966, il se débarrasse du roi par un sanglant coup d’État et s’autoproclame président.

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La première République ougandaise est gouvernée d’une main de fer. Milton Obote se tourne vers le socialisme, non par idéologie mais par souci de construire un État qu’il puisse contrôler. En 1968, il édite son manifeste, la Charte de l’homme ordinaire, dans lequelle il explique son projet de doter ses compatriotes d’un régime où ils ne seraient ni trop riches ni trop pauvres. Deux ans plus tard, c’est le « socialisme à 60 % », c’est-à-dire la nationalisation de 60 % des entreprises privées. Une façon d’étendre son emprise sur le pays. Cette politique lui coûte le soutien des Occidentaux, Britanniques et Américains au premier chef. Ces derniers appuieront discrètement le général Idi Amin Dada jusqu’à son coup d’État, le 25 janvier 1971, effectué en l’absence du président, qui assistait à un sommet du Commonwealth, à Singapour. Milton Obote trouve alors refuge en Tanzanie, sous la protection de son vieux compagnon Julius Nyerere. Mais Idi Amin déçoit les espérances et, en avril 1979, l’armée tanzanienne envahit Kampala pour mettre fin à ce qui est devenu une tyrannie sanguinaire. C’est officiellement par les urnes qu’Obote regagne son pouvoir perdu. Une première sur le continent. Toutefois, il est de notoriété publique que les élections ont été largement truquées.
Dans un pays traumatisé par dix ans de dictature, Obote renoue avec ses vieux démons marxistes – pour ne pas dire staliniens – et joue sur le parti unique et les divisions sociales et ethniques. Dans les fourgons des Tanzaniens se trouvait Yoweri Museveni, qui se considère alors comme le grand perdant du retour d’Obote. La rébellion qu’il va conduire se soldera par le départ d’Obote, en 1985. De son exil zambien, il garde un oeil sur l’UPC et va jusqu’à envisager bientôt un retour au pays. Museveni le prévient qu’il ne s’y opposera pas, mais qu’il devra répondre des 300 000 morts que son régime a coûté au pays. Prudent, Obote préférera son exil doré zambien. Après Mutesa II, Idi Amin Dada et Yusufu Lule, il est le quatrième chef de l’État ougandais à mourir en exil.

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