Sudatel, cet inconnu

Mieux disant dans l’attribution de la troisième licence du Sénégal, l’opérateur du Soudan doit maintenant relever le défi. Et faire taire les rumeurs.

Publié le 18 septembre 2007 Lecture : 3 minutes.

Quelques jours et plusieurs maladresses ont suffi pour transformer en quasi-affaire d’État l’attribution de la troisième licence de téléphonie du Sénégal. Alors qu’elle aurait pu être l’une des dernières transactions phare d’un continent où peu de marchés de cette importance restent à conquérir par les opérateurs de télécommunications. D’ailleurs, les plus grands en parlaient depuis plusieurs années. Notamment Celtel, qui visait avec convoitise une présence de cette envergure, de surcroît en Afrique de l’Ouest francophone, où il est encore peu implanté (Burkina, Niger sur un total de quinze pays en Afrique).
Bouclée en un temps record, la procédure d’appel d’offres gérée par l’Autorité sénégalaise de régulation des télécommunications et de la poste (ARTP), a été la plus courte de l’histoire du secteur : quatorze jours ouvrables. Lancement le 17 août, dépôt des dossiers le 31, décision le 6 septembre. Trois candidats ont participé à la compétition : Bintel, filiale de télécoms du groupe de BTP de Bakr Mohamed Ben Laden, Sudatel, héritier de l’opérateur historique du Soudan, et Celtel. Le délai était-il trop court pour Maroc Telecom et MTN, entre autres groupes affichant une stratégie panafricaine ? « En janvier 2005, il y a dix-huit mois, nous avions lancé un appel à concurrence », rappelle Daniel Seck, directeur général de l’ARTP. En d’autres termes, tout le monde le savait, il fallait être prêt.

Il mise 200 millions de dollars
Bintel, dont la maison mère a été retenue pour construire le nouvel aéroport de Dakar, l’était visiblement, qui déposait quinze classeurs le 31 août sur les bureaux de l’ARTP. Les propositions financières, techniques et commerciales de Celtel tenaient pour leur part dans cinq classeurs et celles de Sudatel dans un seul. Les représentants des trois groupes ont été questionnés à plusieurs reprises par les examinateurs, qui s’étaient assuré les services de la banque d’affaires Rotschild. Compte tenu de sa réputation, il ne peut y avoir de doutes sur la régularité de l’opération. Le nom du vainqueur a cependant suscité des contestations de toutes parts : pourquoi avoir choisi Sudatel, un opérateur si peu connu qu’il ne pouvait guère présenter de garanties sur ses capacités techniques et commerciales ? Les confrères déçus, l’opposition politique et jusqu’au Syndicat des travailleurs de Sonatel, l’opérateur historique sénégalais, qui, le 12 septembre, « désavouait les mesures prises par l’ARTP », ont ajouté leurs reproches et transformé en affaire d’argent et de mauvais choix technologique ce qui aurait pu être l’avènement d’une nouvelle époque de la téléphonie.
Face à quoi les positions de l’ARTP sont claires, mais maladroites. L’absence de Dakar du directeur de l’ARTP, parti en déplacement professionnel au Portugal à l’issue de l’annonce, le 6 septembre, et revenu près d’une semaine plus tard, n’a en outre pas simplifié la communication de mises au point. Lesquelles constituent, au fond, le nud du problème. « C’est une affaire d’argent », clame la rumeur. « Sudatel a proposé 200 millions de dollars, Bintel 153 millions et Celtel 105 millions », rétorque l’ARTP, qui ajoute : « Notre décision repose à 60 % sur le critère financier, 20 % sur le juridique et 20 % sur le critère technique. » C’est une forme d’aveu ! Consulté le 13 septembre, le directeur de l’ARTP nous a précisé les engagements pris par Sudatel (lire l’encadré). Rendez-vous donc en mars 2008, lancement officiel de ses nouveaux services, pour vérifier s’il tient ses promesses.

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