Pourquoi les électeurs n’y croient plus

Publié le 18 septembre 2007 Lecture : 2 minutes.

Depuis que les États-Unis ont renoncé à leur « agenda de la liberté » au Moyen-Orient, les autocrates locaux ne font même plus semblant de s’intéresser à la démocratie. En 2005, une avalanche de consultations électorales avait eu lieu dans le monde arabe. Depuis, elles se sont raréfiées, mais peu importe : les électeurs, eux aussi, ont cessé de s’y intéresser. En s’abstenant massivement, ils signifient qu’ils n’ont plus l’intention de perdre leur temps – et leur bulletin de vote – dans des mascarades électorales destinées à mettre en place des parlements dépourvus de tout pouvoir. Ils ne veulent plus que leurs votes servent uniquement à légitimer les régimes en place.
Les récentes élections législatives au Maroc – un pays où le roi détient la réalité du pouvoir mais autorise les partis politiques à se disputer librement les sièges d’un Parlement largement impuissant – en sont la confirmation : seuls 37 % des électeurs se sont rendus aux urnes. Un triste record.
Dans l’Algérie voisine, où le pouvoir est passé des mains des militaires à celles d’un président omnipotent, ils ne sont pas moins désenchantés. Lors des législatives du mois de mai, le taux de participation n’a pas dépassé 35 %. Là encore, c’est un record. En Égypte, au mois de mars, lors du référendum constitutionnel destiné à renforcer les pouvoirs répressifs du président Hosni Moubarak, ils n’ont été, officiellement, que 27 % à participer à la consultation. Et environ 10 % selon l’opposition.
Les raisons ne manquent pas pour expliquer cette apathie. La moindre n’est pas l’impression de plus en plus fortement ressentie par l’électorat que la majeure partie de la classe politique est, d’une manière ou d’une autre, « cooptée » – sinon corrompue – par le pouvoir. Même les islamistes du PJD, qui ont pourtant fait campagne sur les thèmes de la justice sociale et de la transparence de l’action gouvernementale, ont échoué à séduire les électeurs.
Le problème fondamental est que ces derniers sont convaincus que leur vote ne sert à rien. En 2002, Mohammed VI n’a-t-il pas ignoré le résultat du scrutin en nommant un Premier ministre qui n’appartenait pas à l’une des formations victorieuses ? Et puis, les électeurs à travers tout le monde arabe sont souvent consternés par les réactions des Occidentaux. Ils observent, par exemple, que les Palestiniens ont été punis pour avoir choisi les islamistes du Hamas, au terme d’un scrutin pourtant parfaitement régulier.
Le jeune souverain marocain a certes démontré une vraie volonté réformiste, en favorisant notamment l’adoption d’un code du statut personnel qui renforce sensiblement les droits des femmes. Mais il va devoir tirer de la désaffection croissante des Marocains pour les élections la conclusion qui s’impose : ces derniers veulent un vrai changement. Une façade démocratique ne suffit plus à faire illusion.

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