Mugabe et le prélat

Le pourfendeur du régime a quitté l’Église pour mieux la protéger.

Publié le 18 septembre 2007 Lecture : 2 minutes.

« Archevêque de Bulawayo » : le statut de haut dignitaire de l’Église catholique donnait à Mgr Pius Alick Mvundla Ncube, 60 ans, une voix qui portait haut et loin. Dans un pays majoritairement chrétien (on compte entre 20 % et 30 % de catholiques), il était devenu l’un des contempteurs les plus virulents du régime de Robert Mugabe, qu’il jugeait « pernicieux ».
Mais le 11 septembre, il a renoncé à la charge pastorale du diocèse de Bulawayo qu’il assurait depuis dix ans, une « démission » acceptée par le pape Benoît XVI. Et s’il a promis de continuer le combat, il ne pourra plus désormais brandir son pallium pour le légitimer. Pris en flagrant délit de péché de chair avec une femme mariée, le prélat est au centre d’un scandale qui bouleverse le pays depuis le mois de juillet. Une caméra placée dans sa chambre par un détective privé a enregistré des images du couple au lit. Même s’il n’est reconnaissable que vaguement, la télévision officielle s’en est emparée et la femme volage, Rosemary Sibanda, secrétaire à l’archevêché, aurait fini par admettre une relation de deux ans avec Mgr Ncube, précisant cependant qu’elle était séparée de son mari. Il n’en fallait pas plus pour que le cocufié intente un procès au pécheur.
C’est pour épargner à son Église les retombées de la procédure judiciaire que Mgr Pius Ncube aurait démissionné. Ses collèges n’en ont pas moins décidé de le soutenir. En avril, la conférence des neuf évêques zimbabwéens avait déjà demandé à Robert Mugabe de mettre un terme à l’oppression étatique. À la fin du mois d’août, elle avait loué le courage avec lequel Mgr Ncube témoignait des « méfaits » du pouvoir et s’était offusquée des accusations portées contre lui. L’opposition politique crie, elle aussi, à la machination et ne s’est pas gênée pour renvoyer Mugabe à ses propres écarts avec la religion. Élevé dans la foi catholique chez les Jésuites, ce dernier a fait deux enfants à sa secrétaire avant le décès de son épouse officielle.
L’ex-prélat, lui, ne veut pas baisser les armes. Mais, quelles que soient la réalité de son adultère et l’issue du procès, son autorité morale est entachée. Encore une fois, une voix de l’opposition s’est enrouée au Zimbabwe.

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