Quand les universités africaines passent aux Moocs
Dans la course à l’éducation en ligne, l’Afrique francophone veut sa part du gâteau. L’Agence universitaire francophone va soutenir quatre universités africaines dans la mise en place de projets de Moocs (cours massifs en ligne). La question du modèle économique de ces projets éducatifs reste pour l’instant en suspens.
Lancés aux Etats-Unis, les cours massifs en ligne (« massive online courses » ou Moocs) commencent à gagner l’Afrique. Dix établissements universitaires ont ainsi répondu à l’appel d’offres lancé par l’Agence universitaire de la francophonie (AUF) afin de monter leur propre programme de Moocs. Selon les résultats officiels, parus le 22 mai, quatre établissements africains ont été retenus pour des projets allant de l’écotourisme (initiative de l’Université de Jendouba, Tunisie), à l’économie (université Ouagadougou 2, Burkina Faso et université Ibn Zohr, Maroc), en passant par l’histoire (‘université des sciences sociales et de gestion de Bamako, Mali).
Les Moocs étaient à un niveau d’exigence supérieur à ce qui nous était demandé en présentiel, explique un apprenant.
Opportunité
La question du développement de ce type de programme a d’ailleurs fait l’objet d’une table ronde organisée début mai, à Paris, par l’AUF, et réunissant plusieurs acteurs institutionnels et académiques de l’espace francophone. L’occasion de mettre en avant le potentiel que représentent ces nouveaux outils, ainsi que les barrières qui limitent leur développement sur le continent.
« Les Moocs sont une formidable opportunité pour un pays comme le Cameroun où, chaque année, 50 000 jeunes demandent à accéder à l’enseignement supérieur, pour huit universités d’État et deux universités virtuelles. On compte environ 51 étudiants par enseignant, soit un ratio en-deçà des normes préconisées par l’Unesco », explique Emmanuel Tonyé, responsable au sein de l’Université de Yaoundé.
« En tant qu’auto-entrepreneur, j’avais besoin d’une formation renforcée, pour la gestion de projets. Au départ, je me suis inscrit car c’était gratuit. Quant à la certification, j’ai pu la payer car le coût était bas (en moyenne 50 euros) », explique un étudiant burkinabé, venu spécialement de Ouagadougou pour cette table-ronde.
« Les Moocs étaient à un niveau d’exigence supérieur à ce qui nous était demandé en présentiel, nous pouvions interagir, poser des questions. J’ai rajouté cette formation dans mon curriculum vitae, même si mon besoin était avant tout personnel », ajoute un étudiant sénégalais.
Modèle économique et pédagogique
La question du modèle économique a été soulevée par un grand nombre d’intervenants venus assister au séminaire. En effet, la plupart des Moocs proposés dans le monde francophone misent sur le bénévolat et le volontarisme des enseignants. Or, « contrairement au travail de professeur, qui est un travail solitaire, les Moocs nécessitent une équipe, avec des compétences diverses qui vont de la maitrise de la vidéo et du son à l’expertise disciplinaire et l’analyse des données », insiste Rémi Bachelet, de l’École centrale de Lille.
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« Si, au départ, les initiatives peuvent partir d’une volonté institutionnelle, la question du modèle économique se pose très vite. Nous sommes partis sur la base d’enseignants bénévoles, en s’appuyant sur leur motivation. Il faudrait que l’innovation pédagogique soit inscrite dans le projet de l’université », affirme Rachid Bendaoud, de l’Université Caddi Ayyad, Maroc.
Une solution durable ? Pas pour tous. En effet, le système des subventions tel qu’il existe en France n’est pas transposable en Afrique où les fonds sont rarement disponibles au sein des universités.
Partenariats
Parmi les solutions évoquées durant cette rencontre, il convient de noter la mutualisation inter-universités, la recherche de partenariats ou encore la collaboration avec les entreprises afin de monétiser ces Moocs.
Autre obstacle majeur : la faiblesse de la bande passante. « Malheureusement, le débit est insuffisant pour suivre des cours en ligne : nous devons donc chercher des alternatives », explique Emmanuel Tonyé de l’Université de Yaoundé. À court terme, des solutions ad hoc hors ligne ou des partenariats avec les opérateurs télécoms sont envisageables.
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