Mauvaise réputation

Publié le 17 mai 2004 Lecture : 2 minutes.

«Ils s’en fichent, c’est ça le problème, commente un témoin qui a eu affaire à des médecins bulgares, en Algérie, dans les années 1980. Je me souviens d’un type, un Français, victime d’un grave accident de la circulation. Transporté dans un hôpital de la capitale, il a été plus ou moins bien soigné pendant trois jours. Le quatrième, le médecin bulgare a constaté qu’il était paralysé. Les équipements de l’hôpital étaient insuffisants, c’est vrai, mais il aurait fallu prendre immédiatement la décision de transférer le blessé à Paris. C’était le seul moyen de sauver ses jambes. »
Les anecdotes de ce type abondent. À l’évidence, les médecins originaires d’Europe de l’Est n’ont pas bonne réputation au Maghreb. On les dit indifférents, sous-qualifiés, incompétents. Parfois de manière injuste. Il s’agit souvent de praticiens diplômés dont la valeur est comparable à celle de leurs confrères occidentaux. La durée des études en Bulgarie est sensiblement la même que dans le reste de l’Europe : six ans, plus un an de stage pratique avant une éventuelle spécialisation.
Le découragement des médecins et du personnel soignant venus d’Europe de l’Est s’explique largement par les conditions de travail très difficiles qu’ils rencontrent dans certains pays du Sud. Ce sont des boucs émissaires tout trouvés. Ils servent à occulter la responsabilité des États, la vétusté des hôpitaux, l’état désastreux du matériel, l’absence d’hygiène, de médicaments, de produits antiseptiques, etc. « Si je défends les infirmières bulgares et le médecin palestinien condamnés à Benghazi, ce n’est pas par réflexe corporatiste, commente le Dr Amadou Cissé, un praticien malien membre de Médecins du monde. La Libye est un pays respectable, mais ce n’est un secret pour personne que son système sanitaire est déficient. » Apparemment, les Bulgares ne sont pas seuls à avoir mauvaise réputation.
Très importantes au temps du communisme, les relations commerciales bulgaro-libyennes sont aujourd’hui quasi nulles. La médecine est le seul domaine où la coopération bilatérale perdure. Quatre mille Bulgares, dont 1 500 médecins, continuent de travailler dans le système de santé libyen. Le moins que l’on puisse dire est qu’il ne doivent pas se sentir très à l’aise.

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