Israël : la torture codifiÉe
La khazana (« secousses violentes »), l’obligation de tenir une position inconfortable et douloureuse, ou encore le shabeh, qui consiste à recouvrir la tête du détenu d’une cagoule et à le priver de sommeil pendant une longue période en lui infligeant une musique à très haut volume : telles sont quelques-unes des « pressions physiques modérées » officiellement admises par l’État d’Israël jusqu’en 1999. Mais ont-elles vraiment été abandonnées depuis ?
La légalisation de la torture date de 1987, quand la commission Landau, du nom d’un ancien président de la Cour suprême israélienne, est chargée d’enquêter sur les pratiques des services de sécurité intérieure (Shin Beth) et de Tsahal. La commission argue que la torture est justifiée « pour découvrir une bombe sur le point d’exploser dans un bâtiment rempli de monde ». Les moyens de pression estimés « acceptables » sont énoncés dans un « code de directives », annexe au rapport, jamais rendu public. Une sorte de « guide de la bonne torture » censé rassurer les défenseurs des droits de l’homme.
En 1994, après un attentat suicide qui fait vingt-deux morts à Tel-Aviv, le gouvernement accorde une nouvelle « dispense exceptionnelle » aux responsables des interrogatoires du Shin Beth, les autorisant à utiliser « une pression physique accrue ».
Face aux protestations internationales et nationales, la Cour suprême se décide, finalement, en septembre 1999, à trancher le débat en assimilant ces « pressions physiques modérées » à des actes de torture interdits par la Convention de New York de 1984. Sauf que cette décision n’est applicable que dans les prisons et non dans les centres de détention où se déroulent les interrogatoires du Shin Beth… Parmi ces centres figure le fameux « camp 1391 », resté secret jusqu’en 2003, date à laquelle il a été découvert par l’organisation israélienne de défense des droits de l’homme HaMoked. Que s’est-il passé dans cet établissement, vestige du mandat britannique, qu’aucune carte n’a jamais mentionné ? Des témoignages concordants évoquent des traitements dégradants, accusations rejetées par la Cour suprême en décembre 2003. On peut toutefois penser que le « camp 1391 » n’a pas été surnommé le « Guantánamo israélien » par hasard…
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