Brenda Fassie

La « Madonna des townships » est décédée le 9 mai à Johannesburg

Publié le 18 mai 2004 Lecture : 3 minutes.

C’était en juillet 2001, au Zanzibar Club de Washington. Ce jour-là, la chanteuse sud-africaine Brenda Fassie a déjà poussé ses vocalises pendant trois heures quand elle engage une danse effrénée. Elle s’agite tant et si bien que ses deux seins pointent hors de son corsage. L’assistance retient son souffle. Brenda n’hésite pas : elle montre son arrogante poitrine et proclame : « Ça, c’est l’Afrique ! ».

Les anecdotes de ce genre, qui ont ponctué la vie de la « Madonna des townships », fourmillent dans les tabloïds sud-africains. Elles permettent de se faire une idée de la femme qu’elle fut sans vraiment la dévoiler : sensible et provocatrice, généreuse et extravagante, excessive et passionnée.
Brenda Fassie est née à Langa, un bidonville surpeuplé du Cap, en 1964. Ses parents espèrent un garçon, ils doivent chercher un nom au dernier moment et optent pour celui de la chanteuse de musique country américaine, Brenda Lee. Dès l’âge de quatre ans, inspirée par sa mère pianiste, la petite Brenda forme son premier groupe de chant et, avant même son cinquième anniversaire, elle gagne déjà de l’argent en poussant la chansonnette pour les touristes. À 14 ans, elle tente sa chance à Johannesburg dans deux groupes en vogue, Joy et The Big Dudes. Puis elle enregistre, en 1983, ce qui sera son premier succès : Weekend Special, qui conquiert même le Royaume-Uni. Fidèle à ses racines, elle se montre plus que généreuse envers une famille et des amis guère dénués de scrupules. La gloire est trop soudaine et trop rapide : en 1986, Brenda est presque considérée comme une artiste finie. Un garde du corps nigérian lui a fait goûter les plaisirs interdits de la cocaïne : elle y sombre. Peut-être un peu trop franche, elle avoue ce penchant et son attirance pour les femmes. Son image s’en ressent. En 1990, elle est poursuivie avec son mari Nhlanhla Mambo pour fraude. Elle divorce l’année suivante. Elle peine à honorer ses promesses et nombre de ses concerts sont annulés. Les organisateurs lui demandent de rembourser les frais ; le public va jusqu’à la boycotter. La chute semble interminable. En 1994, Brenda est retrouvée dans le coma à côté de sa compagne, Poppie Sihlahla, qui mourra d’une overdose de cocaïne sur le chemin de l’hôpital. Décidée à refaire surface, la chanteuse suit une cure de désintoxication et renoue avec son premier manager, Peter Snyman. Deux albums sortent, Abantu Bayakhuluma et Now is the Time, sans succès. Interrogée sur le duo qu’elle entonnait avec Papa Wemba, Brenda disait : « Je ne m’en souviens pas, je planais trop ! » En 1997, elle enregistre Memeza qui devient l’un des plus gros succès de 1998, disque de platine en quelques jours. Le tube « Vuli Ndlela » obtiendra la Kora de la meilleure chanson en 1999.

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Dans son pays, elle devient la « diva de la pop » et, surtout, la « reine du kwaito ». Le kwaito est un mélange de house américaine, de hip-hop, de garage britannique, de reggae, de percussions et de chants traditionnels africains. Un genre musical, mais aussi une mode vestimentaire et un style de vie. Le succès aidant, Brenda – dont on dit qu’elle a par trois fois tenté de se suicider – peut s’acheter une luxueuse maison et affirmer qu’elle tient avant tout à s’occuper de son fils. Le calme ne dure pas : très vite, ses frasques sexuelles, maritales et financières défraient de nouveau la chronique. La provocation est sa « marque de fabrique ». En 2000, après un concert où était présent Mouammar Kadhafi, elle déclare : « Je savais qu’il serait là, mais je ne savais pas qu’il était fou de moi. » Ses albums Amadlozi ou Sum’Bulala, où elle chante en xhosa, en zoulou et en sotho, marchent très bien.
Le 26 avril, Brenda Fassie a été hospitalisé après un arrêt cardio-respiratoire au Sunninghill Hospital de Johannesburg. Thabo Mbeki, Nelson Mandela et une flopée de ministres se sont succédé à son chevet. La scandaleuse icône est morte le 9 mai 2004.

The Remix Collection, Brenda Fassie, Emi, 18

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