Un nouveau Spike Lee ?

Publié le 18 mars 2003 Lecture : 2 minutes.

Le plus connu, le plus bouillant, le plus provocateur des cinéastes noirs américains ne déteste pas surprendre. Après Bamboozled (2001), une charge contre l’image que la télévision donne des Noirs, on attendait un film sur les boxeurs africains-américains, comme Joe Louis et quelques autres, puisque Spike Lee avait affirmé travailler sur ce projet. Mais avec La 25e Heure, l’auteur de Malcolm X nous présente une oeuvre totalement « blanche », dépourvue d’allusion à la communauté dont il s’est fait le principal porte-parole sur grand écran, depuis le succès de son premier film, Nola Darling n’en fait qu’à sa tête, en 1986.
Cette vingt-cinquième heure, c’est celle qui verra Monty Brogan, un dealer new-yorkais « parvenu », fournisseur de la bonne société, être incarcéré dans un pénitencier de mauvaise réputation pour y purger une condamnation à sept années de détention. Le spectateur vit en sa compagnie, sur le mode du compte à rebours, ses derniers moments de liberté. Des moments que Monty veut partager avec son père et ses amis de toujours, Jakob et Francis, qui ont choisi une voie tout autre en devenant, l’un golden boy à Wall Street, l’autre professeur. Des moments qu’il consacre aussi à chercher le traître qui l’a dénoncé à la police. Le suspect numéro un n’est autre que… sa compagne, la superbe Portoricaine, si bien prénommée Naturelle.
Magistralement interprété par le sobre Edward Norton, Monty promène son amertume dans les rues de New York, en compagnie de son chien. New York où, peu après l’attentat du 11 septembre, règne une atmosphère de fin du monde, matérialisée par des images de « Ground Zero », les premières tournées pour une oeuvre de fiction depuis l’attaque terroriste. En l’espace de vingt-quatre heures, Monty prend le temps de revisiter les lieux qui lui importent, de mettre à l’épreuve des proches qui ne savent comment lui parler, de trouver et voir châtier le minable qui l’a « vendu » à la police, de maudire enfin une à une toutes les minorités qui composent la mosaïque humaine de Big Apple et qu’il rend responsables de son infortune.
En résulte une sorte de polar psychologique assez prenant. Qui conduit à une réflexion sereine et distanciée sur la responsabilité individuelle, sur la société américaine et la vie à New York dans l’après-11 septembre. Un film néanmoins amoral : le héros fournit de la drogue aussi banalement que s’il faisait du trading ou enseignait, à l’instar de ses amis.
En renonçant à défendre telle ou telle cause, un cinéaste engagé peut vouloir démontrer qu’il est un grand cinéaste tout court. L’essai, qui n’est pas le premier (cf. Summer of Sam en 1999), est plutôt concluant.

Sorti à Paris le 12 mars.

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