Une nouvelle vie pour Alpha Oumar Konaré?

Aucun candidat ne s’est encore déclaré pour la présidence. Soutenu par plusieurs grandes capitales du continent, l’ancien chef de l’État malien est bien placé pour le poste.

Publié le 18 mars 2003 Lecture : 3 minutes.

S’achemine-t-on vers une élection – par consensus – d’Alpha Oumar Konaré à la présidence de la Commission de l’Union africaine ? Cette question devrait être tranchée lors du sommet de l’organisation panafricaine, prévu en juillet prochain à Maputo. L’ancien chef de l’État malien devrait faire connaître sa décision avant la fin du mois de mars, et confirmer aux États membres s’il compte relever ce (nouveau) défi. À 57 ans, « Alpha », comme l’appellent ses compatriotes, a déjà, en effet, plusieurs vies derrière lui.
Il y a d’abord l’intellectuel non conformiste, le passionné d’histoire, de géographie, d’archéologie, de littérature. Mais aussi le journaliste et l’éditeur à qui l’on doit la création, en 1983, de la coopérative culturelle Jamana (« le pays », en bambara), matrice des premiers journaux privés du Mali, La Roue, Cauris, L’Aurore et Les Échos.
Il y a ensuite le militant politique et syndical, qui travailla dans l’ombre à la chute du général Moussa Traoré, chef de l’État malien de 1968 à 1991. En relayant les revendications sociales et politiques par le truchement du mouvement associatif et des journaux précités.
Il participa ainsi, en juillet 1990, à la rédaction et à la diffusion d’un « Appel au peuple malien », et, un mois plus tard, à une « Lettre ouverte au président de la République » en faveur du multipartisme signée de deux cents personnalités influentes. Exploitant les failles du système législatif, il réussit à créer avec quelques camarades, en octobre 1990, une « association », qu’il transformera – avec l’avènement du pluralisme – en parti politique : l’Alliance pour la démocratie au Mali (Adéma).
Il y a enfin « Alpha » président. Élu en toute transparence à la tête de son pays, en avril 1992, reconduit dans ses fonctions cinq ans plus tard, au terme d’un scrutin controversé et, finalement, boycotté par ses principaux adversaires, il s’est effacé à la fin de son second mandat, en laissant un bilan somme toute honorable : un pays où le pluralisme politique n’est pas une simple vue de l’esprit, un État désormais doté d’institutions solides et, en dépit du manque de moyens, d’infrastructures modernes.
Né le 2 février 1946 à Kayes, dans l’ouest du Mali, cinquième d’une fratrie de quatorze enfants, Alpha Oumar Konaré entame sa carrière professionnelle par une brève expérience d’instituteur qu’il interrompt pour reprendre des études sanctionnées, notamment, par un doctorat en histoire et en archéologie à l’université de Varsovie (1975). À son retour au pays, il occupe différents postes dans la fonction publique, avant d’être bombardé par Moussa Traoré – à 32 ans – ministre de la Jeunesse, des Arts et de la Culture (1978-1979), puis des Arts, des Sports et de la Culture (1979-1980). Pour cause de « désaccords avec le chef de l’État », il raccroche au bout de deux ans et retourne à la recherche universitaire…
Après avoir servi à la tête de son pays dix ans d’affilée, Alpha Oumar Konaré, jeune retraité, briguera, si l’on en croit son proche entourage, la présidence de la Commission de l’Union africaine. Dans cette perspective, il ne manque pas d’atouts. Candidat du Mali, il serait pratiquement assuré du soutien d’une majorité des pays d’Afrique de l’Ouest et, affirment ses proches, de l’appui de plusieurs dinosaures du continent. Parmi ses « parrains » les plus cités figurent, en bonne place, le Sud-Africain Thabo Mbeki, le Nigérian Olusegun Obasanjo, le Libyen Mouammar Kadhafi, l’Algérien Abdelaziz Bouteflika, et même le Gabonais Omar Bongo, qui s’est pourtant plaint, ces derniers mois, de « l’appétit vorace » de ses frères ouest-africains pour les postes internationaux.
Tous ces hommes souhaitent, en effet, que le premier président de la Commission de l’Union africaine soit un ancien chef de l’État qui a laissé de son passage aux affaires une bonne image. Pour hériter du fauteuil, Konaré doit néanmoins vaincre les réticences de certains de ses anciens pairs, y compris d’Afrique de l’Ouest, qui n’ont pas gardé de lui que de bons souvenirs. Il doit, par ailleurs, convaincre le président intérimaire de la Commission, l’Ivoirien Amara Essy, de lui laisser la place. Ce qui, selon nos informations, est loin d’être acquis.

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