Une marche en avant inéluctable

Publié le 18 mars 2003 Lecture : 2 minutes.

Il n’est point ici question de se livrer à une description exhaustive de la
jeunesse tunisienne. Il est, en revanche, utile de s’interroger sur ses aspirations et sur le chemin parcouru au fil des années. Ses comportements,
au cours de la dernière décennie, ont considérablement changé. Qu’il s’agisse d’éducation, de murs, de modes de consommation ou de mentalités, cette jeunesse navigue entre deux mondes : le Maghreb, où elle évolue, et l’Occident, si proche géographiquement et si « accessible » via Internet, la télévision par satellite, la mode, etc.
À la fin des années quatre-vingt, il était inconcevable de se promener dans Tunis en minijupe, d’aller en discothèque entre copines ou même d’avoir accès aux « produits occidentaux » quels qu’ils soient. Une télévision indigente, des loisirs modernes quasi inexistants, peu d’échanges avec l’extérieur, une sexualité bridée, des traditions pesantes : ce temps semble aujourd’hui lointain.
Je dois le confesser : je me suis, ces cinq dernières années, quelque peu éloigné de la Tunisie. Après plus de vingt ans de « pratique assidue » du pays, je m’en suis quelque peu lassé. Cet éloignement m’a cependant permis de mesurer une évolution qui, vécue au quotidien, peut paraître moins marquante. Mon dernier séjour, il y a près d’un an, m’a d’ailleurs grandement surpris. Voir des couples se tenir la main dans la rue ; observer les comportements amoureux au grand jour ; surprendre des jeunes filles se trémousser lascivement dans une boîte de nuit, sans chaperon et sans gêne, un verre de whisky dans une main, une cigarette dans l’autre : j’avais l’impression de débarquer d’une autre planète, d’assister à un spectacle inédit.
Évidemment, mes repères sont ceux d’une jeunesse dorée qui possède les moyens de ses ambitions. Plus qu’apparente chez cette bourgeoisie tunisoise, cette mutation n’en est pas moins perceptible dans toutes les composantes de la société. C’est à mes yeux une avancée significative. Une avancée qu’il convient pourtant, comme tout changement majeur, d’accompagner avec le plus grand soin. Heureusement, cette évolution s’est faite lentement – trop, au goût des principaux intéressés. À l’inverse d’autres pays, la Tunisie a pris le temps de muer. Il n’en demeure pas moins que le plus dur reste à faire : enraciner ces mutations et, surtout, répondre aux attentes d’une jeunesse peut-être plus heureuse qu’hier, mais toujours aussi exigeante. Ils sont encore nombreux à rêver, plus ou moins secrètement, d’une autre vie, en Europe ou en Amérique du Nord. C’est là le revers de la médaille : cette (r)évolution en appelle d’autres, et la soif de changement sera difficile à étancher.

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