Mieux préparés pour l’avenir

L’augmentation constante du nombre de diplômés et l’évolution du marché du travail obligent à repenser le système universitaire.

Publié le 18 mars 2003 Lecture : 4 minutes.

Le 17 février fera date dans l’histoire de l’éducation en Tunisie. C’est en effet ce jour-là qu’a démarré l’Université virtuelle tunisienne (UVT), un enseignement dispensé à distance grâce aux nouvelles technologies de l’information et de la communication. Si l’expérience ne concerne encore que quelques modules de formation des techniciens supérieurs en gestion des entreprises, elle n’en permet pas moins d’élargir un peu plus l’accès au savoir. À un moment où le pays doit faire face à une augmentation sensible du nombre de jeunes susceptibles d’entrer à l’université.
En Tunisie, l’école est gratuite et obligatoire. Sur 100 élèves inscrits en première année de l’école primaire, 77 arrivent en neuvième année (l’objectif est d’atteindre 80 en 2004) et 46 décrochent leur baccalauréat. À la rentrée universitaire 2002-2003, on comptait 270 000 étudiants, ce qui signifie que les effectifs ont quadruplé en une décennie. En 2010, leur nombre dépassera 500 000. Aujourd’hui, 8 % de la population a suivi des études universitaires. À titre de comparaison, la moyenne au sein de l’Union européenne (UE) est de 21,2 %. L’université accueille 28,6 % des jeunes âgés de 19 ans à 24 ans, contre 6 % en 1987. Ce taux devrait atteindre 49 % en 2010, soit plus que la moyenne actuelle des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui est de 40 %. Autre évolution : les femmes représentent 55 % des étudiants et 38 % des enseignants.
Cette augmentation progressive du nombre de diplômés constitue une chance et un défi pour le pays. Selon les estimations officielles, la Tunisie comptera 41 200 nouveaux diplômés en 2003. Parallèlement, il y aura 81 700 nouveaux demandeurs d’emplois. En d’autres termes, un demandeur d’emploi sur deux sera diplômé de l’université. Les intégrer dans le tissu économique ne sera pas chose aisée. « Il faut absolument que nos hommes d’affaires investissent dans la compétence, confie Sadok Chaabane, ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de la Technologie. L’insertion des diplômés du supérieur présente deux avantages : accroître la compétitivité et inciter à la création de nouvelles entreprises dans les secteurs porteurs. »
À y regarder de près, on constate que le choix des étudiants se porte de plus en plus sur les filières scientifiques, et plus particulièrement sur les nouvelles technologies de l’information, qu’ils considèrent plus à même de leur fournir des débouchés. Et ce aux dépens des filières littéraires. Environ 50 % des étudiants poursuivent ainsi des études scientifiques. 36 % d’entre eux ont choisi spécialement l’ingénierie et les études technologiques (voir infographie ci-contre). De fait, la part de la population âgée entre 20 ans et 29 ans et diplômée en sciences et ingénierie rivalise avec les indicateurs européens : alors que la moyenne de l’UE se situe à 10,4 pour mille, la Tunisie affiche un taux de 15,8 pour mille. Le Royaume-Uni, pays européen le plus performant dans ce domaine, avance un taux de 17,8 pour mille…
Le gouvernement dit aujourd’hui vouloir tenir compte de l’évolution du savoir, des technologies et de l’industrie pour proposer de nouveaux programmes, de nouvelles filières et de nouveaux diplômes. Bref, pour réussir la « jonction cursus-métier » : « Nous avons donné une réelle autonomie et une très grande souplesse au système universitaire pour offrir des possibilités de restructuration des cursus, des passerelles entre les disciplines, des occasions de formations complémentaires conçue selon les évolutions du marché et les opportunités de création d’entreprises », explique Sadok Chaabane. Le système universitaire tunisien est actuellement proche des normes des pays de l’OCDE, et particulièrement de ceux de l’UE, avec un choix de 409 spécialités, chiffre auquel il faut ajouter les 267 mastères proposés. De nouveaux cycles d’études appliquées en anglais, en sciences humaines et en arts et métiers, ont été lancés, tandis que l’enseignement des langues étrangères a été renforcé pour répondre aux besoins d’une économie globalisée. La part de l’informatique et du multimédia progresse à une vitesse prodigieuse : ils étaient 3 500 à étudier ces matières en 1997, ils sont 24 000 étudiants aujourd’hui, et ils pourraient être 46 000 en 2006. De nouvelles disciplines ont été créées, comme la biotechnologie, la logistique du transport ou la cosmétique.
L’évolution la plus marquante est l’intérêt de plus en plus prononcé des étudiants pour les filières courtes. « Les diplômés de ces filières sont très demandés par les entreprises, c’est pour cela que les étudiants préfèrent s’y inscrire », note un professeur de l’université El-Manar de Tunis. En cinq ans, la proportion des nouveaux inscrits dans ces filières a pratiquement doublé. Ils sont 50 500 étudiants à avoir opté pour ce type de formation, soit 21 % de l’effectif étudiant total, contre 11 % en 1998. Cet engouement, illustré par la prolifération des Instituts supérieurs d’études technologiques (Iset), contribue à élargir l’implantation des universités dans pratiquement toutes les régions du pays. Le nombre des institutions universitaires est passé de 59 en 1987-1988 à 141 en 2002-2003. La création progressive de nouvelles institutions est un des objectifs stratégiques du gouvernement pour développer les régions, partant du principe que c’est l’université qui y tire l’économie. L’ambition du président Ben Ali est d’installer une mini-université dans chaque région d’ici à 2004, complétée par une pépinière d’entreprises et un centre de relais technique. Les filières seraient créées en tenant compte des besoins des régions et de leur complémentarité à l’échelle nationale.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires