L’îlot de la discorde

Malabo dénonce « l’occupation illégale » de Mbagné par les troupes d’Omar Bongo. Et ravive une polémique vieille de trente ans.

Publié le 18 mars 2003 Lecture : 2 minutes.

Mbagné, ses plages, ses cocotiers, son pétrole… Cette carte postale typique du golfe de Guinée sent aujourd’hui le soufre. Au coeur d’un contentieux qui oppose Libreville à Malabo depuis une trentaine d’années, cet îlot est revenu, le 12 mars, sous le feu des projecteurs. En dénonçant son « occupation illégale », le Premier ministre équatoguinéen, Candido Muatetema Rivas, a jeté de nouveau de l’huile sur le feu, ravivant la polémique sur ce confetti de sable situé dans la baie de Corisco, au nord de la capitale gabonaise et au sud-ouest de l’embouchure du Rio Muni.
Relayé par la télévision équatoguinéenne, le message du Premier ministre exhorte le Gabon à se retirer de Mbagné, dont la propriété n’avait pas été clairement tranchée par les anciens colonisateurs respectifs des deux pays, l’Espagne et la France. Cette sortie intervient quelques jours après la visite effectuée le 26 février à Mbagné par le ministre gabonais de la Défense et fils du président Omar Bongo, Ali Ben Bongo, en compagnie du chef d’état-major général des Forces armées gabonaises. En « réaffirmant la souveraineté gabonaise » sur cette partie stratégique du territoire national, le ministre avait annoncé le renforcement des moyens humains et matériels déployés sur place, expliquant que le Gabon se tenait « prêt à faire face à toutes sortes d’agressions ».
Cet îlot de 30 hectares, qui fut déjà à l’origine d’une crise entre les deux pays en 1972, est occupé en permanence par un détachement de la gendarmerie gabonaise. Mais les récentes déclarations dépassent de loin la revendication territoriale. À l’instar de la presqu’île de Bakassi, objet de litige entre le Nigeria et le Cameroun, les eaux territoriales de Mbagné sont fortement susceptibles de recéler des gisements pétroliers. Et au moment où le Gabon voit ses réserves s’amenuiser dangereusement, la Guinée équatoriale connaît, elle, un véritable boom pétrolier : en 2003, sa production d’or noir devrait dépasser celle de son voisin gabonais.
En novembre 1999, les chefs d’État des deux pays, Omar Bongo et Teodoro Obiang Nguema, participaient à la création de la Commission du golfe de Guinée. Cet organe sous-régional a pour but de prévenir ou de régler d’éventuels conflits « dans les eaux de cette mer commune » où les litiges frontaliers peuvent vite dégénérer. Apôtres du dialogue et de la concertation, les deux présidents devront bien un jour statuer sur le destin de cet îlot. Et sur son orthographe. Pour le moment, cette étendue sablonneuse a deux noms : Mbagné pour les francophones de Libreville, Mbañe pour les hispanophones de Malabo.

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