Le FMI pessimiste

Bruits de bottes obligent, le Fonds monétaire international révise à la baisse ses projections en matière de croissance mondiale.

Publié le 18 mars 2003 Lecture : 3 minutes.

Les grandes institutions économiques internationales corrigent successivement leurs prévisions de croissance pour cette année et pour 2004. Pas de miracle en vue : toutes les projections sont orientées à la baisse. Après l’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE), qui a mis en garde l’Europe, au début de mars, contre « l’enlisement de son économie dans une croissance molle », c’est au tour du Fonds monétaire international (FMI) de revoir ses projections pour l’ensemble de l’économie mondiale.
L’institution de Bretton Woods table désormais sur une croissance mondiale de 3,3 %, contre 3,7 dans son rapport de septembre 2002. Les nouvelles données du FMI doivent être publiées à la mi-avril dans le World Economic Outlook, son traditionnel état des lieux annuel. L’activité économique restant assez soutenue aux États-Unis, le Fonds ne révise que légèrement sa projection pour ce pays : 2,4 %, contre 2,6 % dans son rapport d’automne.
C’est en Europe que la situation devient particulièrement préoccupante. Pour les experts de Washington, le taux de croissance de la zone euro ne dépassera pas 1,3 % en 2003, un point de moins que le pronostic établi six mois plus tôt. Ralentissement garanti donc sur le Vieux Continent. La Banque centrale européenne (BCE) serait encore plus pessimiste. Un document interne de l’institution basée à Francfort table sur une croissance de 1 % dans la zone euro pour cette année, et de 2 % en 2004.
Première économie européenne, l’Allemagne peine toujours à sortir du marasme, entraînant le reste de la zone dans son sillage. Le FMI juge « le risque de déflation » important dans le pays du chancelier Schröder. La prévision de croissance n’y est plus que de 0,7 % pour cette année, contre 2 % dans le document de septembre 2002. La France, qui avait déjà revu à la baisse sa prévision de 2,5 % pour l’année 2003, peut donc se réjouir de la progression annoncée de 1,4 % de son Produit intérieur brut (PIB). Dans son intervention télévisée du 10 mars, le président français Jacques Chirac a déclaré que les difficultés économiques de son pays étaient dues « pour une large part aux perspectives de guerre » en Irak. Histoire de souligner en filigrane la responsabilité de l’administration américaine dans la morosité conjoncturelle de la « vieille Europe ».
La situation est tellement préoccupante que le FMI, pourtant pointilleux sur la rigueur budgétaire, appellerait, dans son rapport d’avril, les pays européens à mettre en veilleuse le Pacte de stabilité qui limite à 3 % du PIB leur déficit public. Une invitation à soutenir l’activité comme le font, sans états d’âme, les autorités économiques aux États-Unis. L’Allemagne et la France ont de toute façon déjà été épinglées avoir violé ce critère budgétaire.
Le rapport devrait aussi s’inquiéter des « graves conséquences économiques » en cas de conflit armé en Irak. « Si la guerre provoque beaucoup de dégâts et déborde sur d’autres régions », le FMI s’attend à une amputation de près de deux points de la croissance de l’économie mondiale. Et les pays développés ne seront pas les seuls à être durement affectés. Plus fragiles, les économies d’Afrique, d’Amérique latine et d’Asie dépendent dans une large mesure des importations de matières premières et de produits manufacturés des pays de l’OCDE. Déprime dans les pays riches est potentiellement synonyme de dépression dans les pays pauvres.
Même les États producteurs de pétrole, qui profitent actuellement de la « prime de guerre » – en d’autres termes d’un gonflement des cours de l’or noir – font grise mine. Réunis le 11 mars à Vienne, les pays de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) redoutent un effondrement rapide du prix du baril en cas de victoire éclair des États-Unis en Irak. Mais l’incertitude demeure, qui n’arrange personne. Si la guerre est déclenchée dans les prochains jours, la dernière mouture du World Economic Outlook pourrait être encore plus sombre que la copie qui circule actuellement dans les bureaux de la capitale américaine.

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