De l’utilité des Nations unies

Publié le 18 mars 2003 Lecture : 2 minutes.

En quête des neuf voix nécessaires à l’adoption par le Conseil de sécurité d’une nouvelle résolution concernant l’Irak, l’Amérique courtise avec assiduité la Guinée, le Cameroun et l’Angola. L’absurdité de cet exercice est l’exact reflet de celle des Nations unies elle-même. La Guinée est un endroit fort agréable, et les Guinéens sont des gens tout à fait charmants, mais, depuis l’aube de l’Histoire, qui s’est jamais soucié de ce que pense un pays faible, pauvre et périphérique à un conflit qui se déroule à des milliers de kilomètres de chez lui et ne le regarde en rien ? Et il en va de même aujourd’hui. Sauf aux Nations unies.
C’est la grande affaire du jour, mais, dès qu’ils auront voté, la Guinée, le Cameroun et l’Angola s’enfonceront à nouveau dans l’obscurité. Entre-temps, nous [les Américains] auront été contraints de les acheter, mais leur prix sera moins élevé que celui de la Turquie. Il est vrai que ce dernier pays offre au moins quelque chose de tangible : un territoire à partir duquel il est possible d’ouvrir un deuxième front contre l’Irak. La Guinée, elle, se contentera de lever la main à New York…
Tout cela est ridicule, mais c’est ainsi : les États-Unis sont obligés d’obtenir l’autorisation de la Guinée pour risquer la vie des soldats américains et débarrasser la planète d’un tyran de la plus dangereuse espèce. Elle doit aussi solliciter l’assentiment de la France, ce qui l’est à peine moins. Ce pays prétend à un statut de grande puissance qu’il a perdu depuis cinquante ans. On lui a donné un siège de membre permanent au Conseil de sécurité pour entretenir la fiction d’une France héroïque, partie intégrante de la grande coalition antinazie, alors qu’il a capitulé et collaboré avec l’occupant. Un demi-siècle plus tard, cette mascarade se révèle fort coûteuse. Pour apaiser les Français, nous avons été contraints de négocier la résolution 1441 du Conseil de sécurité, ce qui ne les a pas empêchés de saboter méthodiquement son application et a retardé de plusieurs mois notre intervention.
Dès que les armes se seront tues en Irak, il faudra demander l’élargissement du Conseil de sécurité et accorder à l’Inde et au Japon le statut de membre permanent, afin de diluer l’influence anachronique et disproportionnée de la France.
Par ailleurs, ce pays ne devra jouer aucun rôle en Irak, ni pendant la guerre, s’il venait à changer d’avis, ni après. Pour lui, ni maintien de la paix ni contrats pétroliers. S’agissant du paiement de la dette irakienne, la France devra passer en dernier, après la Russie. Moscou, après tout, s’est simplement opposé à notre politique, il n’a pas essayé de mobiliser le monde contre nous.
Enfin, nous devrions jeter les bases d’une nouvelle alliance appelée à remplacer celles, désormais obsolètes, nouées lors de la guerre froide. Son noyau dur devrait être la « coalition des volontaires » qui se constitue actuellement autour de nous. Nul besoin d’abolir l’Otan. L’attitude grotesque de la France, de l’Allemagne et de la Belgique, qui n’ont pas hésité à bloquer l’aide à la Turquie, a signé la fin de cette organisation. Comme l’ONU, elle périra de son inutilité.

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