Ainsi était Senghor

L’écrivain tchadien Nimrod salue la mémoire de l’académicien sénégalais, « répétiteur universel de la cause de l’esprit ».

Publié le 18 mars 2003 Lecture : 2 minutes.

Les éditions Le Temps qu’il fait nous offrent une agréable surprise avec la publication de ce livre consacré à Léopold Sédar Senghor. Il s’inscrit dans la tradition des tombeaux, commune aux écrivains et aux musiciens, qui consiste à composer une oeuvre en l’honneur d’un personnage vénéré. Parmi les plus célèbres, ceux de Baudelaire dédiés à Edgar Poe et de Ravel à Couperin.
L’auteur a entrepris la rédaction de son hommage le 22 décembre 2001, soit deux jours après le décès de l’académicien. « C’est la poésie qui est orpheline cet hiver, car l’Afrique, sa terre de prédilection, n’accouche plus d’hommes de sa graine », clame Nimrod, écrivain originaire du Tchad, à qui l’on doit, outre des poèmes, un roman prometteur : Les Jambes d’Alice (Actes Sud, 2001).
Inutile de s’attarder sur les polémiques entourant la négritude, la quête identitaire, l’aliénation et le métissage culturels. Elles ont souvent occulté ou brouillé la singularité de l’oeuvre poétique de l’ancien président sénégalais. Sa position, ses responsabilités politiques l’ont souvent empêché de parler en son nom propre. Il s’exprimait au nom de tout un continent.
Ses textes demeurent et nous rappellent la noblesse des sentiments qui nichaient au fond du coeur du président sénégalais. Qu’ils célèbrent la femme ou la nature, le « royaume d’enfance » ou l’Afrique des ancêtres, ses poèmes sont imprégnés de ferveur amoureuse. Ou marqués par la douleur, comme celle occasionnée par la mort de son fils, magnifiée dans « Élégie pour Philippe-Maguilen Senghor ». Ailleurs, c’est la compassion qui l’anime. Sa foi humaniste et la profondeur de son adhésion au catholicisme ont gardé Senghor de toute haine, y compris à l’égard des colonisateurs blancs. Àpeine le racisme lui arrache-t-il ce célèbre cri du coeur : « Je déchirerai les rires Banania sur tous les murs de France. » Autant de vérités que rappelle Nimrod dans une langue épurée, mais avec une fougue qui dit l’admiration qu’il voue à ce « répétiteur universel de la cause de l’esprit ».

Tombeau de Léopold Sédar Senghor, Nimrod, éditions Le temps qu’il fait, 80 pp., 13 euros.

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