Humeur

Publié le 18 février 2003 Lecture : 2 minutes.

Ambigu. C’est le qualificatif qui colle le mieux au sentiment qu’éprouvent les jeunes Africains francophones à l’égard de la France. Chacun a son avis sur l’ancienne puissance coloniale. Mais la divergence de vues entre la nouvelle génération et celle qui a dansé sur Indépendance cha cha, dans les années soixante, est patente. Les anciens dissimulent difficilement la nostalgie de la France de De Gaulle – voire même de Foccart -, bref la France de la communauté de destin avec l’Afrique. Ceux qui sont nés bien après 1960, eux, veulent liquider au plus vite ces réminiscences et affirmer leur indépendance. Le discours des hommes politiques français, qui n’en finissent pas d’« aimer » l’Afrique, de Jacques Chirac à Michel Rocard en passant par Charles Pasqua, agace profondément la jeunesse africaine. Qui ne veut plus être « aimée » et susciter compassion et condescendance.
Les étudiants africains en France, par exemple, aimeraient simplement ne plus faire la queue pendant une journée entière pour obtenir un rendez-vous trois mois plus tard… et se voir attribuer une nouvelle carte de séjour déjà périmée au moment où on la leur remet. Cette réalité kafkaïenne, les habitués de la préfecture de Bobigny, en région parisienne, la connaissent bien. À croire que l’inorganisation et les retards font partie des objectifs de l’administration. Parmi les demandeurs, quid des Africains non qualifiés, handicapés par leur maîtrise très approximative de la langue de Molière ? Solidarité oblige, les jeunes volent à leur secours lorsqu’ils sont traités avec mépris par certains agents administratifs.
Le ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy, vient d’effectuer une visite au Mali. L’accueil a été plutôt froid. Si les étrangers en situation régulière étaient mieux accueillis, peut-être la coopération entre la France et les pays dont ils sont originaires s’en trouverait-elle facilitée. Mais il n’y a pas qu’à Bobigny que l’attente est interminable. Devant les consulats de France d’Afrique, les places se négocient au prix fort. Les candidats au départ sont toujours plus nombreux. À cause des difficultés économiques, mais surtout du néant offert par une classe politique corrompue. C’est pourtant cette jeunesse qui peut construire une nouvelle Afrique. Elle pourrait, débarrassée de tout complexe, collaborer avec la jeune France, celle qui est descendue dans la rue le 1er mai 2002. En toute liberté.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires