Comme vous, je perds patience, Monsieur le Président !

Publié le 18 février 2003 Lecture : 2 minutes.

Je suis vraiment très excité par la dernière raison qu’invoque George W. Bush pour bombarder l’Irak : il commence à perdre patience. Eh bien, c’est aussi mon cas ! Depuis quelque temps, je suis réellement emmerdé par M. Johnson, qui habite un peu plus loin dans ma rue, et par M. Patel, qui tient le magasin de produits diététiques. Tous deux me jettent de drôles de regards. Je suis sûr que Johnson prépare un sale coup, mais je n’ai pas encore pu découvrir lequel. J’ai tourné plusieurs fois autour de chez lui pour essayer de voir ce qu’il mijote, mais il tient tout soigneusement caché : ce qui montre à quel point il est tortueux.
En ce qui concerne Patel, ne me demandez pas comment je le sais, mais je sais de très bonne source qu’il est en réalité un tueur en série. J’ai distribué des tracts dans la rue pour dire que si nous n’agissons pas d’abord, il nous liquidera tous les uns après les autres. Certains de mes voisins me disent : « Si vous avez une preuve, pourquoi ne faites-vous pas appel à la police ? » Mais c’est ridicule. La police me répondra qu’elle a besoin d’éléments pour accuser mes voisins et se perdra dans des arguties sans fin sur les mérites et les inconvénients d’une frappe préventive… Comme je suis le seul, dans la rue, à posséder un bon arsenal d’armes à feu, je compte sur lui pour maintenir la paix.

De même, la politique de Bush à l’égard de l’Irak est la seule manière d’assurer la paix et la sécurité internationales. Le seul moyen sûr d’en finir avec les attentats suicide est de bombarder quelques pays musulmans qui ne nous ont jamais menacés. C’est pourquoi je veux faire sauter le garage de Johnson, sans omettre de tuer sa femme et ses enfants. Frapper le premier ! Cela lui donnera une leçon. Peut-être acceptera-t-il alors de nous laisser en paix et de cesser de me dévisager de façon totalement inacceptable.
Le but à long terme de M. Bush est de rendre le monde plus sûr en éliminant les « États voyous » et le « terrorisme ». C’est un objectif très astucieux : comment savoir en effet qu’il a été atteint ? Comment Bush saura-t-il qu’il a liquidé tous les terroristes ? Et quid des terroristes potentiels ? Ce sont eux qu’il faudrait éliminer, puisque la plupart des terroristes connus se sont déjà éliminés eux-mêmes en jouant les bombes humaines. […] Peut-être Bush ne sera-t-il certain d’avoir atteint son but que lorsqu’il aura éliminé tous les musulmans ? Non seulement les fondamentalistes, mais aussi les modérés qui risquent de se convertir au fondamentalisme.

la suite après cette publicité

C’est exactement la même chose dans ma rue. M. Johnson et M. Patel ne sont que la pointe de l’iceberg. Il y a là des douzaines d’autres individus que je n’aime pas et qui, franchement, me regardent de manière bizarre. Personne ne sera vraiment tranquille tant que je ne les aurai pas tous liquidés. Comme M. Bush, je perds patience. Je vais donner à la rue entière deux semaines – non, dix jours – pour se découvrir au grand jour et pour livrer tous les étrangers, les pirates interplanétaires, les hors-la-loi galactiques, les cerveaux du terrorisme interstellaire. Et s’ils ne le font pas gentiment en disant « merci », je bombarderai toute la rue pour l’expédier dans l’autre monde.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires