Cinq personnages en quête de sens
L’écrivain tunisien Ali Bécheur évoque le blues de ses contemporains. Entre tranches de vie et lieux communs.
Publié le 18 février 2003 Lecture : 1 minute.
Jimmy-Jamel est le patronyme schizophrénique d’un déraciné qui s’abîme dans la contemplation des volutes de son joint et brûle des voitures de luxe à ses heures perdues. Juge d’instruction de son état, Ismaïl porte un regard lucide et sans complaisance sur ceux qui l’entourent. Exaspéré par le manque de civisme de ses concitoyens, il a créé le baromètre de la goujaterie. La très chic Elyssa est une bourgeoise bien mariée, mais en mal d’amour. Elle pousse le cliché jusqu’à s’amouracher de ce gentil loubard qu’est Jimmy. Lola la gitane campe la madame Soleil autour de laquelle gravite tout ce beau monde qui a cruellement besoin d’être consolé. Elle panse les petites blessures et soigne les plaies de ces écorchés de la vie. Tous viendront vers elle, à l’exception de Choucha, femme libérée qui tente de se réconcilier avec la vie grâce au jazz et aux alcools forts.
Voilà les personnages qui composent ce roman polyphonique, signé du Tunisien Ali Bécheur. Une sorte de patchwork où les tranches de vie offrent au lecteur un voyage à travers le Tunis contemporain. Les destins de cinq individus aux prises avec les injustices, les drames, les heureux hasards et les espoirs de l’existence s’entremêlent. Si certains personnages pâtissent parfois des lieux communs dont les habille l’auteur, Ismaïl, le juge, échappe à un traitement stéréotypé. C’est le portrait le plus réussi et le plus attachant. Peut-être parce qu’Ismaïl est le protagoniste le plus proche d’Ali Bécheur, romancier, essayiste, nouvelliste et avocat. Tunis Blues est un roman sur le vide que creuse en nous la perte d’un enfant, d’un parent, d’un amour. Tout le mérite du roman est de distiller au fil de ces pages, à l’intention de ceux qui ne s’en croient plus le courage, une douce incitation à le combler.
Tunis Blues, éditions Clairefontaine, 216 pp., 18,50 euros.
