Bemba sur la sellette

Déjà épinglées pour leurs abus en RDC, les troupes du chef rebelle congolais sont accusées de graves exactions en Centrafrique.

Publié le 18 février 2003 Lecture : 2 minutes.

Jean-Pierre Bemba, ex-homme d’affaires zaïrois reconverti en chef rebelle congolais, sera-t-il l’un des premiers accusés à comparaître devant la toute nouvelle Cour pénale internationale (CPI, voir page 106) ? C’est en tous les cas ce que demande la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH). Dans le rapport qu’elle vient de publier sur la situation en Centrafrique, la Fédération met gravement en cause le président du Mouvement pour la libération du Congo (MLC) : « Il existe des éléments de preuve suffisants pour établir la responsabilité pénale internationale individuelle de Jean-Pierre Bemba, en tant que supérieur hiérarchique pour les crimes de guerre commis par ses subordonnés. » L’enquête adressée au procureur de la CPI a été réalisée à Bangui entre le 25 novembre et le 1er décembre 2002… soit tout juste un mois après la tentative de coup d’État du général Bozizé, ex-chef d’état-major de l’armée centrafricaine, contre le régime d’Ange-Félix Patassé.
Venus prêter main forte au pouvoir en place, les « Congolais » de Bemba sont accusés d’avoir perpétré des crimes de guerre contre les habitants de la région pour les punir de leur complicité passive avec les troupes de Bozizé. Des témoignages de nombreuses victimes civiles imputant formellement aux hommes du MLC des pillages systématiques, des viols et des meurtres émaillent ce rapport. Et des éléments précis permettent d’affirmer que ces crimes ont été commis sur une grande échelle.
Le président du Mouvement pour la libération du Congo n’est pas le seul mis en cause : le mercenaire « tchadien » Abdoulaye Miskine et le président de la République centrafricaine sont également visés par la FIDH. Mais pour Bemba, déjà épinglé pour les abus de ses troupes dans la région congolaise de l’Ituri en janvier, ce rapport vient s’ajouter à une liste déjà accablante.
Le 16 janvier, l’ambassadeur de la RD Congo aux Nations unies a demandé la création d’un Tribunal pénal international pour juger les auteurs des actes de génocide et autres violations graves du droit humanitaire international commis dans le nord-est de la RDC. Dans une lettre adressée au Conseil de sécurité, Ileka Atoki citait nommément Jean-Pierre Bemba parmi les personnes devant être traduites en justice. La veille, la mission de l’ONU en RDC avait rendu public un rapport d’enquête faisant état de massacres dans cette zone. Le rapport confirmait notamment que des actes de cannibalisme ont été imposés par les rebelles à des membres de la communauté pygmée. Le Conseil de sécurité des Nations unies s’est même saisi du dossier, son président du moment, l’ambassadeur français Jean-Marc de La Sablière, rappelant le chef du MLC à ses devoirs vis-à-vis des populations civiles.
De plus en plus montré du doigt par la communauté internationale, Jean-Pierre Bemba fait l’objet de la première plainte pour crimes de guerre jamais déposée par la FIDH devant la Cour pénale internationale depuis son entrée en vigueur le 1er juillet 2002. Si les statuts de la CPI n’ont pas encore été reconnus par tous, ils ont été ratifiés par la République centrafricaine le 3 octobre 2001. Ce qui rend les poursuites possibles.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires