Qui veut la peau du shérif ?

Le colonel Etondé Ekoto, l’ex-homme fort de Douala, est au centre d’une sombre histoire de détournement de fonds.

Publié le 17 octobre 2006 Lecture : 2 minutes.

Le casse-tête politique tient en haleine Douala et fait désormais parler de lui dans la presse locale sous l’appellation « affaire colonel Etondé Ekoto », du nom de l’ancien délégué du gouvernement auprès de la communauté urbaine de Douala. Député, homme d’affaires prospère, officier militaire en retraite, le colonel Édouard Etondé Ekoto, 69 ans, était le leader politique le plus en vue de la province du Littoral et la pièce maîtresse du RDPC, le parti au pouvoir jusqu’à son limogeage de la tête de l’exécutif de la capitale économique du pays le 22 septembre, suivi de la levée de son immunité parlementaire le 5 octobre. Le voici aujourd’hui devant la justice, soupçonné de détournement de fonds.
Le 10 octobre, il a dû se présenter devant le procureur de la République du tribunal de grande instance de Douala, où lui a été remise une convocation pour le 12. Il n’en fallait pas davantage pour que des spéculations fassent le lien entre ses fonctions d’ancien président du conseil d’administration du Port autonome de Douala et l’arrestation, en janvier dernier, de l’ex-directeur général du port, Siyam Siwé. Ce dernier est toujours en prison. De là à se perdre en conjectures sur une prochaine arrestation du colonel Etondé, dont l’immunité parlementaire a été levée, il n’y a qu’un pas.
Cette perspective déchaîne les passions, car la personnalité controversée d’Édouard Etondé ne laisse personne indifférent. Celui que les gazettes locales avaient surnommé « le shérif de Douala » n’est pas n’importe qui. Passé par Saint-Cyr et l’École supérieure de guerre de Saumur (France), le jeune officier est certainement l’un des plus brillants cadres militaires du Cameroun des années 1960. De 1961 – lorsqu’il est nommé lieutenant pour prendre le commandement de l’escadron blindé de Nkongsamba – jusqu’à son départ des casernes, l’homme a laissé une marque profonde dans le milieu militaire camerounais. Pour avoir maté, dans l’Ouest, la rébellion armée contre le pouvoir du président Ahidjo. Pour avoir ensuite formé nombre d’officiers encore en fonctions aujourd’hui. C’est lui, en effet, qui a été, de 1967 à 1970, le premier directeur camerounais de l’École militaire inter- armes du Cameroun (Emiac). En 1978, il quitte pourtant brutalement l’armée, lorsqu’à seulement 44 ans il est mis en retraite anticipée, pour des raisons toujours inexpliquées.
Peu importe. La part de légende attachée au personnage est devenue quasiment une marque de fabrique. « Le colonel est monté à deux reprises au feu pour soutenir le régime de Paul Biya, assure un de ses inconditionnels. La première fois, lorsqu’il a participé à la reconquête du pouvoir lors de la tentative avortée de coup d’État de 1984. Et la deuxième, quand il est descendu dans l’arène politique pour reconquérir Douala aux municipales et aux législatives de 2004, à la tête d’une liste du RDPC. » La ville était alors sous le contrôle du SDF, le parti de l’opposant John Fru Ndi.
Ses états de service passés n’empêchent pas certains de chercher à sonner la fin de parcours du Shérif. Pour des raisons fondées et avouables ?

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