Là où on peut tomber malade

La société Mondial Assistance a procédé à l’évaluation et à la cotation de quelque 800 hôpitaux dans près de 110 pays. À méditer avant de partir en voyage…

Publié le 23 août 2004 Lecture : 5 minutes.

Les collaborateurs du groupe Mondial Assistance interviennent dans presque tous les pays du monde. Pour venir en aide à des touristes, mais aussi à des expatriés, c’est-à-dire à tous les souscripteurs de la société d’assurances. En général, lorsque le service est contacté, c’est que le bobo est plutôt sérieux. Il convient donc de stabiliser le blessé avant de le rapatrier. Mais tous les hôpitaux ne disposent pas forcément des structures nécessaires à la prise en charge de certaines pathologies. Et poser un mauvais diagnostic ou mal aiguiller un patient peut avoir de graves conséquences.
C’est pour disposer d’une base de données fiable et accessible n’importe où dans le monde que Mondial Assistance a entrepris une évaluation des hôpitaux. Réalisée dans près de 110 pays, dont la plupart connaissent une forte fréquentation touristique, elle touche 800 structures sanitaires. Il s’agit en fait des établissements qui ont déjà traité des assurés de la société. Avec l’aide des correspondants locaux, les directeurs médicaux du groupe essaient de quadriller le plus minutieusement possible les différentes régions, de toucher le plus grand nombre de structures. Pour l’instant, explique Guy Bellaïche, directeur médical du groupe Mondial Assistance et médecin urgentiste au SAMU 94 ( le département français du Val-de-Marne ), « ils n’ont pas la prétention d’avoir tout vu ». Les mailles du filet seront de plus en plus fines au fur et à mesure des visites. Ainsi a-t-il eu connaissance, le jour où il quittait l’Éthiopie, de l’existence de deux structures qu’il ne connaissait pas. Qu’à cela ne tienne, elles feront l’objet d’une évaluation lors de la prochaine inspection.
Mais, déjà, cette première enquête, disponible sur l’Intranet du groupe, dresse une cartographie unique de la situation d’un large échantillon d’établissements dans le monde. Les pays développés d’Europe occidentale et des États-Unis n’ont pas subi d’évaluation. Comme le souligne Guy Bellaïche, « un malade, même très grave, sera moins en danger à Boston qu’un autre souffrant d’une banale appendicite dans un pays à risque ».
Comment savoir alors où envoyer tel ou tel blessé ? Les directeurs médicaux des différentes filiales du groupe Mondial Assistance, qui se répartissent chaque année la visite des structures sanitaires, sont eux-mêmes des médecins spécialistes de l’assistance. Ils ont ainsi en tête tous les détails à ne pas oublier, du recensement du matériel à des considérations logistiques, comme la distance séparant la structure de l’aéroport, par exemple. La première partie de leur travail consiste donc à dresser un bilan à partir d’un questionnaire type établi sur des critères objectifs, qui vont de l’équipement aux ressources humaines en passant par l’hygiène.
Vient ensuite une partie subjective. Habitués aux situations d’urgence, ils apprécient la mesure dans laquelle la structure évaluée peut ou non gérer différents cas. Arrive l’étape de la cotation. De 1 à 5 stéthoscopes ( voir le schéma ), à l’image des étoiles attribuées aux hôtels et aux restaurants. Les hôpitaux ne recevant qu’un seul stéthoscope sont immédiatement écartés : « Il y a, dans ce cas, plus de danger à y être admis qu’à être rapatrié vers une structure d’un meilleur niveau, et ce pour presque tous les types de pathologies, et même si l’avion représente lui aussi un risque », explique le Dr Bellaïche.
Globalement, les situations catastrophiques sont minoritaires. Seuls 8 % des 800 hôpitaux évalués n’ont obtenu qu’un seul stéthoscope. De la même façon, seuls 9 % occupent le haut du classement avec un score de 5 stéthoscopes garantissant une qualité de soins idéale pour toutes les pathologies. Alors que plus de la moitié des centres sanitaires inspectés sont à même de traiter leurs patients dans de bonnes ou très bonnes conditions.
Bien sûr, ce panorama laisse apparaître de grandes différences géographiques. Ainsi l’Asie se distingue-t-elle par la présence quasi systématique de très bonnes structures en ville. À Singapour, Bangkok, Hong Kong, Manille, Djakarta ou au Japon, on trouve des établissements de très bon niveau. Heureuses surprises également : l’hôpital de Katmandou ( Népal ) ou encore celui de Pondichéry ( Inde ). D’ailleurs, globalement, l’Inde compte de très bonnes structures urbaines. À l’image de l’hôtellerie, ce pays dispose de chaînes de cliniques proposant un standard de soins de qualité. Pour Guy Bellaïche, « l’Asie est donc parsemée de bons points de chute. Ce qui n’empêche pas quelques soucis opérationnels, comme en Indonésie ». Il est en effet parfois délicat de rapatrier sur Djakarta un patient qui se trouve sur une des 13 000 îles du pays, les plus petites d’entre elles n’étant desservies que par bateau.
Le schéma est à peu près identique en Amérique du Sud. « Les grandes villes sont parfaitement médicalisées, avec des équipements de pointe », constate Guy Bellaïche. Mais hors des zones urbaines, l’état sanitaire est plutôt mauvais, notamment au Brésil, pays particulièrement étendu. Le Mexique devrait bientôt atteindre un très bon niveau général de soins. En effet, un frémissement touristique s’y fait sentir. Avec une monnaie faible mais stable, de magnifiques sites en bord de mer comme en montagne, il présente toutes les caractéristiques d’une destination de choix en devenir. Les chaînes hospitalières espagnoles ne s’y sont pas trompées, puisqu’elles sont prêtes à implanter des établissements dans le pays.
Dans l’ensemble, donc, sur ces deux continents, les infrastructures sanitaires urbaines ont su prendre la route du développement. La réalité est différente sur le continent africain, qui reste largement sous-médicalisé. Certes, l’Afrique australe et septentrionale bénéficient d’établissements tout à fait à niveau. « À Tunis, tout peut être traité », constate le Dr Bellaïche. Les structures privées poussent de tous côtés, et les médecins n’hésitent pas à venir y travailler, puisque les conditions sont bonnes.
Ce qui n’est pas le cas de beaucoup d’autres États africains. Formés en Europe, les praticiens n’ont pas toujours envie de revenir au pays si les structures ne permettent pas l’exercice correct de la médecine. Sur place, les médecins sont pleins de bonne volonté, mais le manque de matériel les empêche de traiter toutes les pathologies. L’inverse est vrai aussi, d’ailleurs. On trouve parfois dans les établissements de soins du matériel de pointe, financé par telle ou telle coopération, mais, comme personne n’a été formé à son utilisation, l’outil reste dans son emballage. Certains pays sont par ailleurs dans une situation sanitaire telle qu’aucun scanner n’y est disponible. Pour diagnostiquer une pathologie traumatique, une radiographie souvent suffit. Mais l’absence de scanner ou d’échographie peut être fatale aux blessés, en cas d’hémorragie interne par exemple.
Heureusement, de bonnes structures quadrillent le continent, que ce soit à Abidjan, à Dakar, à Nairobi, au Caire ou à Libreville. Références régionales, ces établissements sont en mesure d’accueillir des malades stabilisés qui ne peuvent être pris en charge dans les pays voisins. L’Afrique réserve d’autres bonnes surprises. L’évaluation récemment conduite à Djibouti a permis de constater une entreprise de rénovation de la structure par rapport à l’an passé. Maputo abrite pour sa part un organisme gratifié de 5 stéthoscopes : l’Institut du coeur. Et le Ghana possède des structures très correctes. Comme quoi, même si, dans les pays en développement, le lien entre l’essor du tourisme et celui de la capacité de prise en charge sanitaire est étroit, il n’est pas systématique.

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