Qui héritera du Gabon ?

Pas (encore) de vrai favori, des opposants décidés à en découdre, des candidatures multiples et un scrutin à un seul tour… Après quarante et un ans de pouvoir sans partage d’Omar Bongo Ondimba, l’élection du 30 août marque la fin d’une époque. À la clé, une forte mobilisation des Gabonais.

Publié le 27 juillet 2009 Lecture : 3 minutes.

Plus de 51 % en 1993, 66,5 % en 1998, 79 % en 2005…  Depuis que le multipartisme existe au Gabon, Omar Bongo Ondimba a toujours obtenu la majorité absolue dès le premier tour de la présidentielle. Il s’est même offert le luxe d’améliorer son score à chaque nouveau scrutin. De quoi démobiliser les électeurs, qui, s’ils n’imaginaient pas vraiment le Gabon sans lui, étaient de plus en plus nombreux à penser que le « Boss » n’avait pas besoin de leurs voix pour se faire élire. Faute de suspense, la démobilisation n’a cessé de s’accentuer au fil des votes, la proportion des abstentionnistes dépassant même 70 % lors des élections locales d’avril 2008.

Mais cette fois-ci les Gabonais pourraient bien reprendre le chemin de l’isoloir sans qu’on ait à les en prier. Pour la première fois de leur vie, les électeurs d’Owendo, de Franceville, de Bitam ou de Lambaréné vont pouvoir prendre part à un scrutin qui ne sera pas joué d’avance. Et, pour la première fois, le nom du gagnant ne sera pas connu avant même que le dépouillement ait commencé.

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Signe de l’engouement que suscite déjà la présidentielle du 30 août, les Gabonais se sont bousculés dans les mairies pour se faire inscrire sur les listes électorales, laissant présager un fort taux de participation. Au fur et à mesure que se mettait en place le cadre de la prochaine élection, un autre phénomène est venu donner à la compétition une dimension inattendue. Passé le deuil d’Omar Bongo, les politiciens gabonais ont enfin pu donner libre cours à leurs ambitions longtemps contenues, et se porter candidats à la magistrature suprême. Près d’une quinzaine de noms devrait finalement être retenus par la Commission électorale nationale autonome et permanente (Cenap), dont plus d’une demi-douzaine de challengeurs crédibles. Sur le papier, quatre représentants de la majorité – Ali Bongo Ondimba, Casimir Oyé Mba, André Mba Obame et Jean Eyeghe Ndong – et trois de l’opposition – Pierre Mamboundou, Zacharie Myboto et Paul Mba Abessole – sont susceptibles d’engranger plus de 5 % des voix. Cet éparpillement des candidatures devrait donc donner lieu à une compétition particulièrement ouverte.

Autre élément qui contribue à entretenir l’insoutenable suspense, la loi électorale, modifiée en 2003, prévoit que l’élection à la magistrature suprême ne se joue qu’en un seul tour (voir encadré). Une règle qui, en l’absence de personnalité omnipotente comme l’était le président fondateur du Parti démocratique gabonais (PDG, au pouvoir), Omar Bongo Ondimba, ouvre la porte à toutes les conjectures. En l’absence d’enquêtes d’opinion crédibles et sans second tour propice à toutes les tractations, chacun ne pourra compter que sur les siens. D’autant que jamais le corps électoral n’a été aussi éclaté. Alors que certains prédisaient un vote identitaire, la présence de quatre candidats issus de la communauté fang (numériquement la première du pays) va certainement diluer les voix. Au sein de l’opposition, les différents candidats attendaient ce grand soir – le premier scrutin sans Bongo – depuis trop longtemps pour laisser passer leur chance, aussi maigre soit-elle. Dans ces conditions, la désignation d’un candidat unique par une opposition radicale coalisée est plus qu’improbable.

Enfin, le germe de la division règne au sein même du PDG, et la désignation d’Ali Bongo Ondimba comme candidat officiel a attisé bien des rancoeurs. L’apparition de candidatures dissidentes marque aussi la fin d’une époque pour l’ex-parti unique, formation longtemps incontestée dont les militants gardaient en permanence le doigt sur la couture du pantalon. Le PDG, qui a tourné la page de l’unanimité, risque en outre de subir dans une certaine mesure un vote-sanction de la part de ceux qui voient dans le décès de leur président l’avènement d’une nouvelle ère. Même si personne aujourd’hui ne peut dire à quoi elle ressemblera.

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