L’UPM est-elle mort-née ?

Lancée à l’initiative de la France en 2008, l’organisation résisterait difficilement au boycott par les pays arabes du sommet des chefs d’État et de gouvernement, le 7 juin.

Le lancement de l’Union pour la Méditerranée, le 13 juillet 2008 à Paris. © LUDOVIC/REA

Le lancement de l’Union pour la Méditerranée, le 13 juillet 2008 à Paris. © LUDOVIC/REA

Publié le 19 avril 2010 Lecture : 3 minutes.

De l’aveu même du conseiller spécial du président français, le très souverainiste Henri Guaino, le fait que l’Union pour la Méditerranée (UPM) ait survécu au conflit de Gaza, il y a un peu plus d’un an, tient du miracle. Lancée en grande pompe, à Paris, en juillet 2008, l’organisation est encore dans les limbes et se montre bien incapable de se substituer aux Américains au Proche-Orient. Certains Européens comme Hubert Védrine, l’ancien ministre français des Affaires étrangères, estiment que mieux vaudrait revoir ses ambitions à la baisse et se contenter de soutenir l’administration Obama dans l’espoir qu’elle obtienne des concessions de Benyamin Netanyahou, le Premier ministre israélien.

Voir l’interview vidéo de Hubert Védrine ci-dessous

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Ce dernier a confirmé sa participation au sommet des quarante-trois chefs d’État et de gouvernement, le 7 juin à Barcelone. Mais les dirigeants arabes menacent de boycotter le rendez-vous.

« Nous nous réunirons prochainement avec la coprésidence égyptienne pour réfléchir à la conduite à tenir, indique un diplomate. Mais le décret de l’armée israélienne qui va permettre l’expulsion ou l’arrestation de milliers de Palestiniens vivant en Cisjordanie ainsi que la reprise de la colonisation ne sont pas des nouvelles encourageantes. » L’absence des chefs d’État arabes condamnerait de facto la réunion et hypothéquerait l’avenir de l’Union.

« Seuls les dirigeants sont capables de transgression (traduction : de prendre des décisions), a expliqué Guaino lors du Forum de Paris, le 10 avril. S’ils ne viennent pas, on ne redonnera pas d’impulsion politique. » Et de rappeler que, réunis récemment, les hauts fonctionnaires n’ont même pas été en mesure de trouver les fonds nécessaires au financement du siège du secrétariat général, à Barcelone : « Certains ambassadeurs européens ont affirmé que leur pays ne donnerait pas un centime. Imaginez-vous un chef d’État dire cela en plein sommet ? »

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Lourde machine

C’est paradoxal, mais c’est ainsi : c’est un eurodéputé socialiste français, Vincent Peillon en l’occurrence, qui, le mois prochain, défendra l’UPM devant les parlementaires de Strasbourg. « Les tensions politiques et les conflits régionaux ne doivent pas freiner la possibilité d’avancer concrètement vers des coopérations sectorielles et multilatérales », peut-on lire dans son projet de rapport, dont Jeune Afrique s’est procuré une copie.

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Peillon propose en outre de ne pas « se limiter à octroyer des prêts ou à demander a posteriori la labellisation UPM de projets aux financements préexistants », mais d’accroître le nombre des financements européens

En attendant, la France et l’Espagne s’efforcent de faire accélérer la « lourde machine » des réunions ministérielles et techniques, afin de présenter un bilan honorable au mois de juin. Pour l’instant, seuls 10 milliards d’euros ont été promis, essentiellement dans le cadre du Plan solaire et de l’environnement. Mais de nombreux autres projets ont été identifiés concernant les six grands thèmes retenus à Paris : dépollution de la mer, transports, énergies renouvelables, éducation, petites et moyennes entreprises, protection civile.

D’autres initiatives sont en préparation, comme la mise en place d’un programme Erasmus junior méditerranéen (pour les échanges entre élèves du secondaire), ainsi que la création d’une chaîne de télévision et d’une banque d’investissement. Paris et Madrid travaillent également à une grande initiative pour la paix. Mais faute d’un relais politique, tous ces beaux projets risquent de rester dans les tiroirs des fonctionnaires. Et ce relais passe obligatoirement par le prochain sommet des chefs d’État et de gouvernement. À condition, bien sûr, que celui-ci ait lieu !

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