La guerre est déclarée

Presque un an après l’accord de Dakar, les crispations entre le camp du chef de l’État et l’opposition resurgissent et paralysent la vie politique. Les premiers accusent les seconds de « mener une campagne mensongère » et de « raviver la question ethnique ».

Messaoud Ould Boulkheir, le 17 avril 2010. © D.R

Messaoud Ould Boulkheir, le 17 avril 2010. © D.R

Publié le 27 avril 2010 Lecture : 2 minutes.

Les Mauritaniens savaient déjà que Messaoud Ould Boulkheir est une grande gueule, mais ils n’imaginaient pas qu’il irait jusque-là. « Notre programme n’est plus le dialogue, notre programme n’est rien d’autre que le départ de Ould Abdelaziz, la chute de son régime », s’est emporté le président de l’Assemblée nationale, le 17 avril. Un anathème contre le chef de l’État lancé en public, à Nouakchott, au cours d’un meeting au programme explicite : « Échecs et duperies du régime. » Ce rassemblement était organisé par la Coordination de l’opposition démocratique (COD), dont « Messaoud » a assuré la présidence tournante jusqu’au 19 avril, date à laquelle il a laissé la place à Ahmed Ould Daddah.

Saute d’humeur du leader de l’Alliance populaire progressiste (APP), connu pour sa verve souvent acide ? Autres membres phares de la COD, le Rassemblement des forces démocratiques (RFD) d’Ahmed Ould Daddah et l’Union des forces de progrès (UFP) de Mohamed Ould Maouloud cautionnent la déclaration de guerre.

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En fait, Messaoud Ould Boulkheir a réagi à un discours prononcé par le chef de l’État un mois plus tôt : « Nous n’allons pas partager le pouvoir avec qui que ce soit et nous n’allons céder sur rien à ce sujet », avait-il lancé, avant d’accabler l’opposition de tous les maux. Pour cette dernière, c’est une provocation.

L’affrontement politique par diatribes interposées ramène la Mauritanie en arrière. Il y a un an, les deux camps luttaient déjà l’un contre l’autre : celui de la COD – baptisé, à l’époque, Front national de défense de la démocratie – exigeait le retour à l’ordre démocratique et le départ d’« Aziz », arrivé au pouvoir par un coup d’État en août 2008 ; celui d’Aziz travaillait sa légitimité auprès des masses, tout en décriant l’opposition.

Mais, depuis, un accord signé à Dakar en juin 2009 est censé avoir réconcilié les deux parties autour de la tenue d’une élection présidentielle – organisée en juillet 2009 et remportée par Aziz – et du principe d’un « dialogue national inclusif ».

L’opposition a toujours contesté la mise en œuvre de la première clause, ayant boycotté la cérémonie d’investiture du chef de l’État après avoir dénoncé des fraudes électorales. Quant à la seconde, elle considère qu’elle n’est pas appliquée. Elle argue notamment qu’Aziz ne l’a jamais reçue, alors que la loi sur le statut de l’opposition prévoit des consultations régulières avec le président de la République. Programmer la chute d’un régime qu’elle juge non démocratique est-il la solution ? C’est sur ce prétexte qu’Aziz avait renversé son prédécesseur il y a bientôt deux ans. Stratégie ou autisme, trois jours après, son gouvernement n’avait toujours pas réagi à l’annonce de Messaoud.

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