Le spectre de l’extrême droite
À travers l’Europe, les partis populistes et xénophobes comptent désormais des députés dans quatorze Parlements nationaux.
Un séisme vient de frapper la Suède. Après les élections législatives du 19 septembre, des députés d’extrême droite vont, pour la première fois, siéger au Parlement de ce petit pays scandinave, inventeur de la social-démocratie moderne. Les Démocrates de Suède (SD) ont en effet remporté 5,7 % des suffrages et vingt sièges au Riksdag, tandis que le Parti social-démocrate enregistre son plus mauvais score depuis 1914. Leur leader, le peu charismatique Jimmie Akesson, a mené sans surprise une campagne anti-immigration fortement teintée d’islamophobie. « Bien sûr, tous les immigrants ne sont pas des criminels, estime-t-il, mais il y a une connexion. »
L’image de la Suède s’en trouve naturellement écornée, mais c’est l’arbre qui cache la forêt. La vérité est que peu de pays européens sont épargnés par cette poussée de l’extrême droite nationaliste. L’éclatement de la crise financière, en 2008, a entraîné des pertes d’emplois et l’adoption de mesures d’austérité qui ont indiscutablement favorisé le phénomène. « Mais les difficultés économiques ne suffisent pas à expliquer cette évolution, estime Jean-Dominique Giuliani, président de la Fondation Robert Schuman. La mondialisation a entraîné l’ouverture des frontières et provoqué des inquiétudes que le populisme transforme en réactions identitaires. » D’où un rejet croissant du multiculturalisme. Et, plus encore, de l’islam.
Outre la Suède, des députés d’extrême droite siègent dans les Parlements de treize pays européens : Italie, Belgique, Pays-Bas, Finlande, Lettonie, Lituanie, Slovaquie, Hongrie, Autriche, Slovénie, Bulgarie, Grèce et Danemark. En Italie, la Ligue du Nord, le principal allié de Silvio Berlusconi, participe même au gouvernement. L’un de ses membres, Roberto Maroni, est ministre de l’Intérieur. En France, le Front national ne compte aucun député en raison des particularités du système électoral, mais il reste un acteur majeur de la scène politique. En 2000, l’Autriche a été sanctionnée par l’Union européenne après l’entrée au gouvernement de représentants du FPÖ, le parti du très extrémiste Jörg Haider, aujourd’hui décédé.
Même quand elles ne parviennent pas à faire élire des députés, les formations d’extrême droite réussissent souvent à polluer le débat politique, les partis de la droite classique n’hésitant pas à reprendre à leur compte une partie du discours extrémiste.
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