Le Parlement libyen à nouveau attaqué par un groupe armé

Le Parlement libyen a été attaqué dimanche par un groupe probablement issu des milices anti-islamistes de Zenten, tandis que sa suspension était annoncée par un militaire originaire de la même ville. Deux jours plus tôt, ce sont les milices islamistes de Benghazi qui subissaient des raids menés par un général à la retraite avec l’appui d’une partie de l’armée…

Le CGN après l’entrée en force de dizaines de manifestants, le 3 mars 2014. © AFP

Le CGN après l’entrée en force de dizaines de manifestants, le 3 mars 2014. © AFP

ProfilAuteur_PierreFrancoisNaude

Publié le 19 mai 2014 Lecture : 3 minutes.

Une nouvelle fois, l’anarchie semble un mot assez faible pour caractériser la situation qui prévaut en Libye depuis la chute de Kadhafi, en octobre 2011. Le Parlement a été attaqué dimanche par un groupe armé, peut-être téléguidé par l’ancien général Khalifa Haftar, comme l’a évoqué le président du Congrès général national (CGN, Parlement), Nouri Abou Sahmein. Mais des témoins ont affirmé que les assaillants faisaient partie des puissantes brigades de Zenten (170 km au sud-ouest de Tripoli), connues pour leur opposition aux islamistes et qui avaient déjà attaqué le CGN par le passé.

>> Lire aussi : Nouri Abou Sahmein, un pion des islamistes ?

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Ces brigades se sont retirées des lieux peu de temps après l’attaque, et des affrontements les ont opposés plus tard à des milices rivales sur la route de l’aéroport. Ces violences ont fait deux morts et 55 blessés, selon un bilan du gouvernement. Mais dans la soirée, un haut-gradé originaire de la ville de Zenten, disant parler au nom de l’armée, a ajouté à la confusion par ses déclarations.

"Nous, membres de l’armée et les révolutionnaires (ex-rebelles), nous annonçons la suspension du CGN", a déclaré le colonel Mokhtar Fernana, commandant de la Police militaire, sur deux chaînes privées de télévision, précisant qu’il ne s’agissait pas d’un coup d’État. Il n’a cependant pas indiqué comment cette annonce allait être mise en œuvre, en l’absence d’une armée professionnelle dans un pays où les milices font la loi.

Plus tard, une des deux télévisions qui ont diffusé le communiqué, Libya International, a été la cible d’une attaque à la roquette, provoquant des dégâts matériels, mais sans faire de victimes, selon lune chaîne considérée comme le bras médiatique des brigades de Zenten.

Le CGN joue les prolongations

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Élu en juillet 2012 pour 18 mois, le CGN à majorité islamiste a provoqué la colère d’une grande partie de la population en décidant de prolonger son mandat jusqu’à décembre 2014. En février, les brigades de Zenten avaient donné au CGN quelques heures pour quitter le pouvoir, sans toutefois passer à l’action après l’expiration de leur ultimatum. Le Congrès avait aussitôt dénoncé une menace de "coup d’État". Sous pression, le CGN a cependant annoncé qu’il allait céder la place à un nouveau Parlement, à l’issue d’élections dont la date n’a pas encore été fixée.

Quelles que soient les auteurs réels de cette nouvelle offensive contre le Parlement, le gouvernement a affirmé dimanche soir dans un communiqué qu’il n’y avait "aucun lien réel" entre les évènements de Tripoli et ceux de Benghazi, à 1 000 km à l’est, où Khalifa Haftar, un général à la retraite, avait lancé vendredi matin une opération contre des groupes islamistes lourdement armés qui ont fait de cette ville leur fief.

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Le général libyen à la retraite Khalifa Haftar, durant une conférence de presse à Abyar (70 kilomètres au sud-ouest de Benghazi), le 17 mai 2014. © AFP

Au moins 79 morts à Benghazi

Ces affrontements ont fait au moins 79 morts et 141 blessés. Plusieurs officiers de la région orientale, y compris de l’armée de l’air, ont rejoint la force de Haftar qui a mené des raids aériens contre des positions de groupes radicaux. En réponse, la base aérienne de Benina a été la cible dans la nuit de dimanche à lundi, d’une attaque à la roquette qui n’a pas fait de victimes, selon le commandant de la base, Saad Al-Werfalli, qui a accusé des islamistes radicaux d’en être responsables.

Si M. Haftar a retiré ses troupes de Benghazi vendredi, il affirme qu’il ne s’agit pas d’un "abandon". "Chaque bataille est suivie d’une réorganisation de nos unités. Et nous allons revenir avec force", a-t-il déclaré samedi. Mais Tripoli a considéré cette offensive comme une tentative de coup d’État, selon un communiqué lu samedi par le président du CGN.

M. Haftar a rejeté en bloc ces accusations et martelé que son objectif n’était pas de prendre le pouvoir mais de combattre le terrorisme. Originaire de l’Est, Khalifa Haftar a été un cadre de l’armée de Kadhafi avant de se faire capturer lors de la guerre libyo-tchadienne (1978-1987). Il a obtenu plus tard l’asile politique aux États-Unis où il a passé près de 20 ans avant de rentrer pour participer à la rébellion de 2011.

(Avec AFP)

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