Agro-industrie : Siat et GMG, un deal bien huilé

La Société d’investissement pour l’agriculture tropicale basée à Bruxelles, fait entrer à son capital une filiale du chinois Sinochem. Elle veut ainsi renforcer son assise financière et monter en puissance dans l’hévéa.

Un saigneur entaille le tronc d’un hévéa pour recueillir la sève à Ikembélé. © Tiphaine Saint-Criq pour J.A.

Un saigneur entaille le tronc d’un hévéa pour recueillir la sève à Ikembélé. © Tiphaine Saint-Criq pour J.A.

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© Vincent Fournier pour JA

Publié le 11 avril 2012 Lecture : 3 minutes.

Son huile de table Cuisin’or et ses pains de savon Pursavon, made in Gabon, sont bien connus dans la sous-région, bien plus que son producteur, la Société d’investissement pour l’agriculture tropicale (Siat), dont le siège social est implanté à Bruxelles. Créé en 1991 après l’acquisition d’une plantation de palmiers à huile de 3 000 hectares dans l’État d’Edo, au Nigeria, le groupe a tissé très discrètement sa toile sur le continent. Après le Nigeria, il a successivement réussi son implantation au Ghana, au Gabon puis en Côte d’Ivoire, à la faveur de la privatisation des sociétés publiques dans ces pays.

Complexes industriels

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De fait, le groupe belge possède aujourd’hui sur le continent 55 000 ha de palmiers à huile et 16 000 ha d’hévéas, soit au total 71 000 ha de plantations, auxquelles s’ajoutent trois complexes industriels d’huile de palme au Nigeria, au Ghana et au Gabon. En Afrique, Siat fournit par exemple Nestlé ou Unilever en produits dérivés comme l’oléine ou la stéarine, qui entrent dans la fabrication de certains aliments (les biscuits, par exemple).

Son résultat d’exploitation a légèrement dépassé les 180 millions d’euros en 2011, contre 63 millions en 2006. Pour cette année, le groupe, dont la filiale gabonaise est désormais bénéficiaire, table sur un résultat d’exploitation de 204 millions d’euros. Fort de cette croissance et encouragé par un contexte mondial favorable – avec une hausse de la demande d’huile de palme (3 % par an) et de caoutchouc (3,5 %) -, il multiplie les initiatives pour accélérer son expansion en Afrique.

Le 21 février, son président et actionnaire majoritaire (83,25 % à travers son holding familial Fimave), l’industriel belge Pierre Vandebeeck, a ainsi signé un protocole d’accord visant à céder 35 % du capital à GMG Global, une filiale du chinois Sinochem International basée à Singapour. Montant de l’opération : 146 millions d’euros. « Tous les audits ont été réalisés et le deal devrait être finalisé en juillet, assure Helena Vandebeeck, directrice générale et fille du patron. En fait, il s’agit dans un premier temps d’une cession d’environ 14 % des parts actuelles puis, dans un second temps, d’une augmentation de capital qui diluera la participation de Fimave à 51 %. »

Au Gabon, Olam met la pression

L’État gabonais et le singapourien Olam viennent d’annoncer un investissement de 183 millions de dollars (138 millions d’euros) dans le développement, à partir de 2013, d’une plantation d’hévéas et dans la construction d’une usine de transformation de caoutchouc au Gabon. Il s’agit, en fait, d’une coentreprise détenue à 80 % par le singapourien et à 20 % par Libreville. La plantation s’étendra sur 28 000, puis 50 000 hectares. L’objectif de production est de 62 000 tonnes par an à l’horizon 2020. Au Gabon, Olam investit également 1,5 milliard de dollars dans l’huile de palme (100 000 ha).

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À travers ce rapprochement stratégique, le groupe belge réalise doublement une belle opération. D’abord, il renforce son assise financière, ce qui facilitera son développement. Siat intensifie en effet ses prospections en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale. Il est notamment en quête d’opportunités au Cameroun, en Guinée, au Liberia et en RD Congo. Des contacts ont déjà été pris dans ce dernier pays, où le potentiel agro-industriel est très prometteur – terres fertiles, climat favorable et main-d’oeuvre disponible. L’inconvénient reste la législation qui freine les ambitions du groupe, notamment la loi qui impose des coentreprises avec un actionnariat à 51 % congolais.

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Un pied au Cameroun

Par ailleurs, Siat, qui entend se renforcer dans l’hévéa (plus rentable que le palmier à huile, à superficie égale), s’associe ainsi avec un groupe bien implanté dans deux pays phare, le Cameroun et la Côte d’Ivoire. GMG Global détient 90 % de la société Hévéa du Cameroun (Hevecam, une plantation de 41 000 ha et une usine de transformation de plus de 50 000 tonnes métriques de caoutchouc par an) et 51,2 % de Tropical Rubber Côte d’Ivoire (1 560 ha et une usine de 36 000 tonnes métriques par an). Par ailleurs, Siat, qui tire 50 % de ses revenus du caoutchouc et dont les principaux clients sont Michelin et Firestone, va pouvoir accéder au marché chinois par l’intermédiaire de Sinochem International.

Si le groupe belge monte en puissance grâce à l’arrivée de ce nouvel actionnaire, il reste encore loin des leaders africains comme la Société internationale de plantations d’hévéas (SIPH, filiale de l’ivoirien Sifca). Malgré la crise postélectorale en Côte d’Ivoire, SIPH, deuxième producteur africain de caoutchouc, a réussi à vendre plus de 130 000 t en 2011 – presque autant que l’année précédente. Aidée par la bonne tenue du cours du caoutchouc (2,65 euros/kg fin 2011), la société a même vu son chiffre augmenter de 36,4 % sur un an, à 403 millions d’euros. Reste que la multiplication des investissements laisse présager une rude concurrence. 

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