La croissance africaine aiguise l’appétit d’Oncle Sam
La croissance du continent aiguise l’appétit des investisseurs américains. Grandes enseignes et banques d’affaires veulent leur part du gâteau. Et ce n’est qu’un début.
États-Unis : Africa is beautiful
Les Américains ont gardé longtemps en mémoire le titre choc que l’hebdomadaire britannique The Economist avait consacré à l’Afrique en 2000 : "Le continent sans espoir". C’est dire s’ils ont laissé la Chine, l’Inde et le Brésil découvrir avant eux que l’Afrique subsaharienne était "le continent qui monte" (The Economist, 2011), puis "le continent de l’espoir" (The Economist, mars 2013). Leurs responsables chargés du commerce avec l’Afrique ont eu beau leur démontrer que les 22 milliards de dollars (16,3 milliards d’euros) d’exportations vers ce continent faisaient vivre 100 000 personnes aux États-Unis, "le marché africain n’apparaît toujours pas sur l’écran radar du monde des affaires américain", reconnaît Witney Schneidman dans une note sur les "cinq raisons pour lesquelles l’Afrique devrait être une priorité pour les États-Unis", publiée en mars 2013 par le think tank Brookings Institute de Washington.
Longtemps les investisseurs ont eu du mal à oublier les statistiques sombres de la Banque mondiale et de l’ONU, qui classent 15 pays subsahariens parmi les 20 pays les plus fragiles de la planète. Ils y sont donc allés à tout petits pas, puisque l’Afrique ne draine que 1 % des investissements américains dans le monde. En matière d’investissements, l’Amérique occupe une place médiocre parmi les fournisseurs des 50 milliards de dollars d’investissements directs étrangers (IDE) qui misent chaque année sur l’Afrique, selon la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced).
Les grandes enseignes se développent
Mais un tam-tam plus entraînant s’est fait entendre. Le bureau d’études McKinsey répète depuis 2010 que l’Afrique est le continent le plus attractif, car le retour sur investissement y est le meilleur au monde, ou presque. Le Fonds monétaire international (FMI) a calculé à partir des chiffres de croissance de 2001 à 2012 que ce continent compte six des dix économies les plus dynamiques de la planète.
Puis les analystes ont souligné à l’envi les beaux atouts africains : aujourd’hui, une classe moyenne de 350 millions de personnes et, en 2050, un produit intérieur brut (PIB) presque équivalent à celui de l’Europe et, sur cinq actifs dans le monde, un Africain. De quoi faire rêver de nouveaux pourvoyeurs de fonds. Car, jusque-là, les investisseurs américains étaient surtout des mastodontes intéressés par les minéraux (Newmont Mining) et les hydrocarbures (ExxonMobil, Chevron), secteurs qui monopolisent la moitié de leurs investissements en Afrique. "Les esprits sont en train de changer aux États-Unis, analyse Luc Rigouzzo, cofondateur du fonds Amethis Finances. Leurs investisseurs découvrent que l’Afrique est un continent de consommateurs. Les grandes enseignes comme McDonald’s [fast-food], Procter&Gamble [hygiène, produits de beauté] ou Walmart [grande distribution] ont été les premières à s’en apercevoir. Elles ont d’abord mis le cap sur les pays anglophones, comme l’Afrique du Sud, le Ghana ou le Kenya. Les secteurs ciblés dans un premier temps ont été les télécoms [Microsoft], le BTP et la finance. Mais les fonds américains élargissent leur champ de prospection et, dans deux ou trois ans, ils deviendront très actifs."
>> Lire aussi : Ces milliardaires qui croient en l’Afrique
Des infrastructures énergétiques de long terme
Les banques d’affaires et les fonds spécialisés lorgnent les quelque 3 000 milliards de dollars amassés par les fonds de pension auxquels cotisent les pompiers, les infirmières ou les avocats d’Oklahoma ou de Pennsylvanie. D’abord parce que ces fonds investissent pour cinquante ans, durée qui permet de financer des équipements énergétiques de long terme dont le continent a un énorme besoin : barrages, lignes à haute tension, centrales électriques thermiques, éoliennes, parcs photovoltaïques… "Il ne faut pas oublier les fondations universitaires et les centres de santé, Rockefeller, Howard Hugues, Bill & Melinda Gates, qui vivent des revenus de leurs placements, qui misent forcément à long terme et qui sont obligatoirement très "conservateurs", c’est-à-dire prudents", ajoute Luc Rigouzzo.
À la recherche de rendement (donc d’actions), de sécurité (donc d’entreprises cotées) et de diversification (donc plus seulement dans les pays anglophones), les gestionnaires américains devraient bientôt arpenter l’Afrique ou s’en remettre aux spécialistes de Londres, de Paris et de Genève pour dénicher les belles affaires qui s’y épanouissent… et qui peuvent rapporter gros.
La croissance économique de l’Afrique pousse les investisseurs américains à s’intéresser au continent. Cliquez sur l’image. © Jeune Afrique
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