Prison ferme pour quatre grandes figures de l’Angolagate

Six ans de prison ferme pour Arcadi Gaydamak et Pierre Falcone, quinze mois pour Jean-Charles Marchiani, un an pour Charles Pasqua: le tribunal correctionnel de Paris a condamné mardi à de lourdes peines quatre grandes figures de l’Angolagate, un trafic d’armes remontant aux années 1990.

Publié le 28 octobre 2009 Lecture : 3 minutes.

Seules six relaxes ont été prononcées tandis que 36 personnes au total étaient condamnées (dont une dizaine à de la prison ferme) pour avoir, soit participé à l’organisation de ce commerce « illicite » vers l’Angola estimé à 790 millions de dollars, soit bénéficié de « pots-de-vin » distribués par Pierre Falcone et Arcadi Gaydamak.

La justice reproche aux deux associés d’avoir entre 1993 et 1998 vendu à l’Angola, alors en pleine guerre civile, des armes provenant de l’ancien bloc soviétique, sans avoir reçu d’autorisation de l’Etat français.

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« Rarement, on avait atteint un tel degré dans l’organisation et la dissimulation d’une délinquance générant des profits considérables », a estimé le président du tribunal, Jean-Baptiste Parlos.

Il a décrit l’homme d’affaires israélien d’origine russe Arcadi Gaydamak, qui n’est jamais apparu au procès, comme quelqu’un qui « derrière le masque de l’honorabilité, (. . . ) se joue des frontières, des lois et de la justice ».

Quant à Pierre Falcone, qui a écouté les yeux fermés une grande partie de la lecture du jugement, il a quitté l’audience encadré de deux gendarmes, le président ayant ordonné son « arrestation immédiate ».

Les deux hommes, condamnés à six ans de prison ferme conformément aux réquisitions, devront également verser des sommes très importantes au fisc et aux parties civiles.

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Leurs avocats ont immédiatement annoncé leur intention de faire appel, la défense de Pierre Falcone, Me Emmanuel Marsigny, parlant d’une condamnation « totalement démesurée ».

Un appel suspend l’exécution d’une condamnation, mais pas dans le cas de Falcone un mandat de dépôt a été émis à l’audience. Gaydamak, en fuite, reste pour sa part sous le coup d’un mandat d’arrêt.

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« En ne cherchant pas d’autres responsabilités, notamment au niveau des instances politiques (. . . ) le tribunal a donné une fausse lecture à ce dossier », a affirmé Me Marsigny.

Le sénateur et ex-ministre de l’Intérieur Charles Pasqua, 82 ans, impliqué dans plusieurs affaires judiciaires, a été pour la première fois condamné à une peine de prison ferme (un an), dont il dénonce « l’inanité » et contre laquelle il va faire appel. Il a par ailleurs demandé la levée du secret-défense sur les ventes d’armes.

« Je demande au président de la République de lever le secret-défense sur toutes les ventes d’armes, sur toutes ces opérations qui ont été réalisées à l’étranger afin que l’on sache s’il y a eu des retours de commissions en France et qui en a bénéficié », a-t-il dit mardi soir sur France 2.

L’ex-préfet Jean-Charles Marchiani a écopé de quinze mois de prison ferme.

Parmi les autres personnalités accusées d’avoir bénéficié des largesses des deux associés, Jacques Attali, ancien conseiller de François Mitterrand, et le magistrat Georges Fenech ont été relaxés.

Le fils du président défunt, Jean-Christophe Mitterrand, a été condamné à deux ans de prison avec sursis, et le romancier Paul-Loup Sulitzer à quinze mois avec sursis.

Ce dernier s’est déclaré « personnellement soulagé », mais a trouvé la justice « excessivement dure » pour Pierre Falcone, dont il a serré le bras à l’audience après l’énoncé de sa peine.

Ce jugement intervient alors que Paris et Luanda tentent de réchauffer des relations diplomatiques longtemps mises à mal par l’Angolagate. L’enquête avait mis en cause une trentaine de responsables angolais, mais aucun n’a été renvoyé devant la justice.

L’Angola avait tenté d’empêcher le procès, invoquant le secret-défense. Mais dans son jugement le président a constaté « l’inopposabilité du secret-défense », tout comme il a rejeté l’immunité diplomatique invoquée par Pierre Falcone, nommé en 2003 représentant de l’Angola auprès de l’Unesco.

L’opposition angolaise a salué depuis Luanda ce jugement. Il met « notre gouvernement dans une situation embarrassante. C’est un coup dur pour notre diplomatie », a déclaré à l’AFP le porte-parole de l’Unita, Alcides Sakala.

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