Journée de l’abolition de l’esclavage: exposition à Bordeaux, ancien port négrier

Deuxième port négrier de France pendant deux siècles, Bordeaux (sud-ouest) tente de regarder son histoire en face avec l’inauguration d’une exposition permanente consacrée au commerce atlantique et à l’esclavage, sans pour autant faire acte de repentance.

Publié le 10 mai 2009 Lecture : 2 minutes.

Bordeaux, qui accueille ce 10 mai la cérémonie de la journée nationale de commémoration de la traite négrière, fut le point de départ entre 1672 et 1837 de près de 500 expéditions maritimes qui déportèrent d’Afrique environ 130. 000 esclaves vers les Antilles. Il est alors le deuxième port négrier de France derrière Nantes (ouest).

Mais c’est surtout au commerce de denrées produites par les esclaves que la ville doit sa richesse. A la veille de la Révolution, Bordeaux accaparait près de la moitié du commerce français en envoyant vers les « îles à sucre » deux fois plus de navires que Nantes ou Marseille (sud-est).

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L’exposition du musée d’Aquitaine, qui dévoile gravures, cartographies et vidéos sur l’enfer des traversées atlantiques, s’articule autour de chapitres évocateurs d’une époque ayant permis le développement économique de la cité: « La fierté d’une ville de pierre », « Bordeaux porte océane, l’Atlantique et les Antilles », « L’Eldorado des Aquitains » et « Héritages ».

Pour l’adjoint à la culture Dominique Ducassou, « Bordeaux n’a jamais voulu cacher cette partie de son Histoire, même s’il n’y avait pas jusqu’à présent une forte visibilité de cette page » particulière de la ville.

Le seul monument bordelais rappelant l’esclavage est un buste de Toussaint Louverture, père de l’indépendance de Haïti, inauguré en juin 2005 et installé sur la rive droite du fleuve de la Garonne.

« On ne refait pas l’Histoire. Ce n’est pas un devoir de repentance, c’est une réalité de l’Histoire de Bordeaux. On la constate, on la regrette, et on l’expose pour les générations à venir », tranche-t-il.

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Le directeur du musée, François Hubert, ne souhaite pas non plus s’apesantir sur le passé: « De cette histoire douloureuse est née une réalité de valeur universelle comme la musique telle le jazz ou la littérature. L’Histoire est en train de se dépasser d’elle-même grâce au métissage », juge-t-il.

« La difficulté est d’arriver à construire un discours historique sur un sujet complexe et à l’illustrer avec des documents et des objets » car par définition les esclaves ne possédaient rien, souligne-t-il pour expliquer l’inauguration tardive de l’exposition.

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Ce n’est qu’en 1999 que le maire de Bordeaux, Alain Juppé, engagea « une politique de la juste mémoire » avec une exposition temporaire sur l’esclavage, baptisée « Regards sur les Antilles », grâce au don de 600 documents iconographiques au musée d’Aquitaine par un collectionneur d’origine lyonnaise.

En 2006, la ville commanda un rapport du comité de réflexion sur la traite des noirs à Bordeaux, présidée par l’écrivain Denis Tillinac, pour faire progresser le travail de mémoire.

Alain Juppé indique, dans un document de présentation de l’exposition, souhaiter avant tout « aider à comprendre sans anachronisme culpabilisateur » et « refuser toute amnésie » en inscrivant dans la mémoire de Bordeaux sa relation avec l’esclavage.

L’association DiversCités, qui a longtemps accusé la ville d’occulter son passé, s’est félicité de « ce pas positif » mais elle espère toujours la mise en oeuvre de la proposition du rapport Tillinac: l’édification à Bordeaux d’un mémorial de la traite des noirs.

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