Ebola: Les bidonvilles de Freetown, maillon faible de la lutte contre la maladie

Entassés dans leurs baraques de tôle et de bois rongées par l’humidité de l’Atlantique, les 15. 000 habitants de Kroo Bay, le plus grand bidonville de Freetown, attendent chez eux que l’épidémie d’Ebola recule, leur unique et dérisoire stratégie contre le virus.

Ebola: Les bidonvilles de Freetown, maillon faible de la lutte contre la maladie © AFP

Ebola: Les bidonvilles de Freetown, maillon faible de la lutte contre la maladie © AFP

Publié le 14 août 2014 Lecture : 2 minutes.

Une marée de déchets en plastique jetés à la rivière par les habitants de quartiers plus résidentiels de la capitale sierra-léonaise, situés en amont, s’échoue chaque jour à Kroo Bay, qui tire son nom de migrants de la tribu Kru, au Liberia voisin, venus se fixer là dans les années 1960.

« C’est un bidonville. Nous avons beaucoup de caniveaux, des bactéries, des microbes. Nous avons beaucoup de problèmes dans ce quartier, même sans Ebola », résume Hassan Sesay, 38, ans, père de six enfants.

la suite après cette publicité

Les maladies se propagent comme des feux de forêt dans cet ancien village de pêcheurs, sans électricité ni eau courante, avec une seule clinique et quatre toilettes publiques.

Une épidémie de choléra dans les quartiers pauvres de la capitale il y a deux ans avait fait près de 400 morts, davantage que les 334 décès d’Ebola recensés en Sierra Leone dans le cadre de l’épidémie qui touche depuis huit mois quatre pays d’Afrique de l’Ouest.

L’épidémie se concentre dans la région forestière de l’est de la Sierra Leone, aux confins de la Guinée et du Liberia. Mais dans la capitale, à quelque 300 km et une journée de route, seuls quelques cas ont été recensés.

– Les habitants terrés chez eux –

la suite après cette publicité

Les habitants, qui subsistent de la pêche, de la récupération des métaux, de la boulangerie ou de la menuiserie, avouent désormais passer le plus clair de leur temps terrés chez eux, en attendant que la fièvre hémorragique passe.

« Tout le monde se sent mal en voyant ce que fait Ebola », dit Moussu Diallo, 20 ans, mère de deux enfants. « Je n’ai jamais rencontré personne qui avait le virus mais je m’inquiète pour mes enfants ».

la suite après cette publicité

Des cochons pataugent dans la boue orange des ruelles, tandis que des femmes se douchent en plein air et que les enfants lavent leurs vêtements sous la pluie torrentielle, qui tombe six mois par an à Freetown.

– 35 ans d’espérance de vie –

Malgré les vicissitudes du quotidien, Kroo Bay était plein de vitalité, jusqu’à l’arrivée d’Ebola dans le pays.

« Nous ne sortons plus à présent. Nous restons à la maison à parler d’Ebola et comment il se transmet », explique Mohamed Kamara, 24 ans, fils du chef local.

« Je dois rester chez moi pour ne pas attraper la maladie », poursuit le jeune homme, étudiant en économie.

Selon le chef religieux musulman du quartier, El Hadji Abubakar, tous s’enferment car « ils sont remplis de peur et de panique à l’idée que cette maladie arrive ».

L’imam de 62 ans, un âge canonique à Kroo Bay où l’espérance de vie avoisine 35 ans, soit 10 ans de moins que la moyenne nationale, assure, comme chaque personne interviewée par l’AFP, que la population est bien informée sur Ebola et les moyens de réduire les risques de contamination.

Pourtant, aucun des dispositifs prophylactiques omniprésents ailleurs à Freetown, seaux de solution chlorée, gants de latex, n’est visible de Kroo Bay.

El Hadji Abubakar laisse entendre que les habitants ne font exception à leur quarantaine volontaire que pour quêter l’intervention d’une force supérieure à celle de services de santé submergés par l’ampleur de l’épidémie.

« Les gens vont encore à la mosquée pour prier, bien sûr », précise-t-il, « ils vont implorer Dieu ».

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires