Nigeria: occupée par Boko Haram, « libérée » par les Tchadiens, Gamboru est « une ville fantôme »

Kachalla Moduye a fui sa ville de Gamboru , dans le nord-est du Nigeria, tombée en août 2014 aux mains de Boko Haram. Il vient d’y retourner après l’intervention tchadienne qui en a chassé les islamistes et a découvert « une ville fantôme », dévastée.

Nigeria: occupée par Boko Haram, « libérée » par les Tchadiens, Gamboru est « une ville fantôme » © AFP

Nigeria: occupée par Boko Haram, « libérée » par les Tchadiens, Gamboru est « une ville fantôme » © AFP

Publié le 21 février 2015 Lecture : 3 minutes.

« Nous avons trouvé une ville fantôme, jonchée de véhicules brûlés, bâtiments détruits et maisons vides », raconte Kachalla Moduye, joint samedi au téléphone par l’AFP depuis Kano, la plus grande ville du nord du Nigeria.

« Beaucoup de maisons ont été incendiées lors de l’invasion de Boko Haram et dans les combats avec les soldats tchadiens pour reprendre (Gamboru). Celles qui n’ont pas été brûlées ont été pillées par les hommes de Boko Haram », ajoute M. Moduye, réfugié à Fotokol, au Cameroun voisin, de l’autre côté de la frontière.

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C’est sous escorte militaire tchadienne qu’il a pu se rendre vendredi, deux heures durant, à Gamboru. Comme lui, des milliers d’habitants de plusieurs localités du nord-est du Nigeria se sont réfugiés au Cameroun. Tous ont fui les attaques meurtrières et exactions multiples commises depuis six ans par Boko Haram, qui s’est emparé de larges portions du nord-est nigérian face à des forces nigérianes incapables d’endiguer son expansion.

Les islamistes, après avoir lancé plusieurs attaques contre Gamboru, avaient fini par en prendre le contrôle en août 2014. Ils en ont été chassés début février par les troupes tchadiennes ayant fait mouvement depuis Fotokol, à l’issue de violents combats ayant fait plusieurs morts parmi les insurgés.

En plus du Tchad, le Cameroun et le Niger combattent à leurs frontières Boko Haram, qui a étendu ses attaques à ces pays.

Fanna Bukar, mère de trois enfants, fait également partie des Nigérians réfugiés côté camerounais et qui ont pu traverser le pont de 300 mètres reliant Fotokol à Gamboru pour aller voir leurs maison. Elle aussi ne peut que constater les dégâts.

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« Il n’y avait rien dans ma maison à part les trois lits en bois et mes vieux fauteuils. Toutes les autres affaires ont été volées. Même ma machine à coudre que j’avais hâte de récupérer a été emportée », déplore-t-elle.

En dépit de l’ampleur des destructions et des pillages, beaucoup de réfugiés se sont dits rassurés par leur brève visite à Gamboru.

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« Voir, c’est croire. Nous sommes maintenant convaincus: notre ville a été libérée », avance Kachalla Moduye, espérant retourner bientôt chez lui refaire sa vie « une fois que Boko Haram aura été complètement anéanti ». « Je suis sûre que nous retournerons bientôt chez nous recommencer une nouvelle vie », renchérit Fanna Bukar.

– ‘Pour le meilleur et pour le pire’ –

Si l’heure était à l’espoir pour ces réfugiés de Gamboru, d’autres habitants du nord-est du Nigeria se trouvaient bloqués dans leurs villages, avec une interdiction de fuir édictée par Boko Haram.

Selon plusieurs témoignages de villageois du district de Marte, près de Gamboru, les islamistes bloquaient samedi chez eux des centaines d’habitants d’une douzaine de villages dans un contexte de progression de l’armée tchadienne, qui mène l’offensive contre le groupe depuis début février en utilisant des moyens aériens et des troupes au sol.

Les villages concernés sont Kwalaram, Bukar-Mairam, Abbaganaram, Sidir, Kirta, Jibillaram, Zannari, Kutukungulla, Baranga, Kitikime, Krenuwa et Jillam.

Les islamistes « ne permettent à personne de partir et menacent de tuer quiconque tenterait de fuir », a ainsi affirmé Maji Zaram, qui a réussi à s’échapper de Kitikime et à gagner Fotokol, prétextant qu’il allait chercher du bois en brousse.

« Ils ont dit que nous devions rester avec eux pour le meilleur et pour le pire, que nous ne pouvions pas les abandonner après avoir reçu notre part du gâteau », a-t-il ajouté.

Les habitants des villages concernés « récoltent ce qu’ils ont semé », a accusé Maji Ariye. Selon lui, beaucoup ont refusé de s’enfuir quand ils en avaient l’occasion parce que Boko Haram leur apportait de la nourriture et d’autres biens pillés lors de ses attaques. « Maintenant que la roue tourne contre leurs bienfaiteurs, ils veulent partir. « 

Au Nigeria, l’insurrection islamiste et sa répression par les forces nigérianes a fait au moins 13. 000 morts depuis 2009.

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