Génocide rwandais: l’Élysée déclassifie les documents de la présidence française

Après un an de préparatifs conduits dans le plus grand secret, l’Élysée a déclassifié mardi les archives de la présidence française sur le Rwanda pour la période 1990 à 1995, un geste important au jour du 21e anniversaire du déclenchement du génocide rwandais, le 7 avril 1994.

Génocide rwandais: l’Élysée déclassifie les documents de la présidence française © AFP

Génocide rwandais: l’Élysée déclassifie les documents de la présidence française © AFP

Publié le 7 avril 2015 Lecture : 3 minutes.

Les relations entre la France et le Rwanda avaient été plombées par une violente polémique autour du rôle éventuel des forces françaises dans le génocide. Elles ont même été totalement gelées entre 2006 et 2009.

« Le secrétaire général (Jean-Pierre Jouyet) a signé aujourd’hui la décision portant déclassification des archives des documents de l’Élysée relatifs au Rwanda entre 1990 et 1995 », a annoncé l’entourage du président Hollande.

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La décision a été signée en présence de Dominique Bertinotti, ancienne ministre et mandataire des archives de la présidence de François Mitterrand, a précisé l’Élysée.

Entre avril et juillet 1994, quelque 800. 000 personnes avaient été tuées en une centaine de jours, selon l’ONU, des membres de la minorité tutsi pour l’essentiel. Les massacres avaient débuté au lendemain de l’attentat qui avait coûté la vie au président hutu Juvénal Habyarimana le 6 avril 1994.

Selon l’entourage de François Hollande, le président « avait annoncé il y a un an que la France devrait faire preuve de transparence et faciliter le travail de mémoire sur cette période sans que cette décision ne soit rendue publique ».

Depuis, le recensement des archives a été « lancé et coordonné » par le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), les documents mêlant des notes des conseillers diplomatiques et militaires de l’Élysée, mais aussi des comptes rendus de conseils restreints de défense ou de réunions ministériels.

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« Rien n’interdit plus la consultation de ces archives » qui seront ainsi à la disposition des chercheurs, des associations de victimes ou de la société civile, souligne la présidence française qui parle d’un « souhait de vérité ».

Dans quelque temps, précise-t-elle encore, d’autres archives seront déclassifiées, celles de l’Assemblée nationale et des ministères des Affaires étrangères et de la Défense, chacun allant « à son rythme » dans cette procédure.

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– « Exigence de vérité et de transparence » –

Parmi ces documents, figurent les « archives Quilès », du nom de l’ancien ministre socialiste Paul Quilès qui avait présidé la mission des commissions de la Défense et des Affaires étrangères de l’Assemblée sur les opérations militaires conduites par la France et l’ONU, notamment, au Rwanda entre 1990 et 1994. Son rapport avait été publié en décembre 1998.

Dans un communiqué publié mardi soir, SOS Racisme se « félicite » de cette déclassification, un acte répondant à « une exigence de vérité et de transparence ».

« Depuis plusieurs années, la France a soufflé le chaud et le froid face à la responsabilité de certains de ses ressortissants dans la préparation et le déroulement du génocide », or « le respect dû aux victimes de ce drame tout autant que la reconstruction des rescapés ne peuvent se faire que par une exigence de vérité et de transparence à laquelle participe François Hollande à travers cet acte », estime l?association antiraciste.

L?Union des étudiants juifs de France (UEJF) « salue » elle aussi « un pas important », espérant qu?il « facilitera la lutte contre le négationnisme malheureusement répandu au sein d?une partie de la classe politique française ».

SOS Racisme considère néanmoins que « le chemin est encore long et escarpé » : la France devra notamment « accepter de reconnaître l?implication de certains de ses ressortissants » dans le génocide « et faire en sorte qu?ils aient à répondre de leurs actes devant la justice ».

L’actuel président rwandais Paul Kagame accuse toujours la France de complicité dans le génocide, reprochant à Paris d’avoir soutenu le gouvernement extrémiste hutu qui avait déclenché les tueries. Mais Paris a rejeté à de multiples reprises ces accusations, assurant que les forces françaises n’avaient fait qu’oeuvrer à la protection des populations civiles.

Cette procédure de déclassification, spécifie-t-on par ailleurs à l’Elysée, est distincte de la vingtaine de procédures judiciaires toujours en cours au pôle « crimes contre l’humanité » du tribunal de Paris. En mars 2014, Pascal Simbikangwa a été condamné à 25 ans de réclusion à l’issue d’un premier procès à Paris.

Deux autres Rwandais, les anciens bourgmestres Tito Barahira et Octavien Ngenzi, ont été renvoyés devant la cour d’assises et attendent désormais leur procès qui pourrait se tenir entre mai et juillet 2016 dans la capitale française.

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