L’Afrique du Sud, sans croissance et prisonnière du chômage
Le chômage n’a jamais été aussi élevé depuis 2003 en Afrique du Sud, frappant surtout la jeunesse noire, moins bien formée, alors que l’économie manque de dynamisme, d’électricité, sans compter cette année des problèmes de sécheresse, selon les derniers indicateurs officiels publiés mardi.
L’économie sud-africaine, la plus industrialisée du continent, a enregistré une croissance de seulement 1,3% du PIB au premier trimestre, selon l’agence nationale statistique Stats SA.
Loin de la performance attendue sur le reste du continent, de 4,5% à 5% en moyenne.
Sans être complètement désastreux, ce chiffre, qui doit beaucoup à la contraction de l’activité manufacturière (-2,4%) et aux mauvais résultats agricoles, a déçu une majorité d’analystes.
Au quatrième trimestre 2014, le PIB sud-africain avait progressé de 4,1% par rapport au troisième trimestre.
L’activité minière, paralysée l’an dernier par une grande grève pour les salaires dans le platine, s’est redressée.
Mais l’industrie manufacturière a ralenti. « Il est un peu difficile de dire si c’est à cause de l’électricité ou de la faible demande », a commenté le statisticien général Pali Lehohla.
Depuis novembre, Eskom la compagnie publique électrique impose des délestages tournants, privant de courant de nombreuses entreprises ou foyers, pour assurer la maintenance en retard de ses centrales, vieillissantes et insuffisantes face à la demande.
Le taux de chômage, publié mardi également, a atteint 26,4% sur la même période — un record depuis 2003 –, ce qui n’est pas fait pour apaiser un climat social tendu par la pauvreté et les inégalités salariales plus de vingt ans après la fin du régime raciste d’apartheid.
« Ce pic est un phénomène nouveau », a observé M. Lehohla qui commentait ces chiffres pour la presse par liaison vidéo depuis Le Cap.
Un jeune sur deux au chômage
Un mois après les violences xénophobes, analysées par beaucoup comme le signe des frustrations accumulées par la population, la statistique officielle met en lumière la réalité quotidienne de huit millions de Sud-Africains: l’absence de travail.
Au premier trimestre, Stats SA a recensé 5,5 millions de chômeurs (+9,2% par rapport à début 2014). A cela, s’ajoutent 2,4 millions d’actifs « découragés » selon la terminologie statistique, c’est-à-dire qui ont renoncé à chercher un travail.
Parmi les 15-24 ans, ceux qui n’ont pas connu l’apartheid, la ségrégation économique et les écoles de seconde zone de l’époque, c’est un jeune sur deux qui est au chômage (50,3%).
Sur un an, la croissance sud-africaine ressort à 2,1%, et reste dans les clous des prévisions de la banque centrale pour 2015.
« Le tableau n’est pas sombre, mais préoccupant. La croissance a plus de chance de diminuer que l’inverse vu l’état critique d’Eskom », souligne Ryan Wibberley, analyste chez Investec.
Les analystes de Nedbank partagent cette vision, estimant que les coupures de courant, les cours déprimés des matières premières et la faiblesse de la demande mondiale ne permettent pas d’espérer un miracle, même si les ventes de détail reprennent des couleurs.
Pour couronner le tout, une bonne partie de l’Afrique australe connaît un grave épisode de sécheresse, perturbant les récoltes, notamment de maïs, produit de base de l’alimentation locale.
La semaine dernière, la banque centrale sud-africaine a révisé à la marge sa prévision de croissance pour cette année à 2,1% (contre 2,2% auparavant).
Les responsables monétaires ont cité comme risque principal pour le rythme de l’activité « les hausses de tarifs d’électricité, le taux de change et les accords salariaux », prévenant aussi que les taux d’intérêt allaient devoir augmenter.
L’Afrique du Sud aurait besoin de 5% à 7% de croissance pour résorber son chômage chronique.
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