Enquête pour corruption en marge d’un projet de Total en Libye

Deux juges français enquêtent sur de possibles faits de corruption en marge d’un projet de contrat gazier de Total en Libye, dans lequel était intervenu lc, a appris jeudi l’AFP de source proche du dossier.

Enquête pour corruption en marge d’un projet de Total en Libye © AFP

Enquête pour corruption en marge d’un projet de Total en Libye © AFP

Publié le 5 décembre 2013 Lecture : 3 minutes.

Négocié à partir de 2008, ce contrat n’a pas abouti. Mais il a donné lieu au versement par le groupe français de 9,8 millions de dollars (6,9 millions d’euros) à une société contrôlée par M. Takieddine, selon des documents consultés par l’AFP.

Les juges désignés pour enquêter, Renaud van Ruymbeke et Roger Le Loire, cherchent à vérifier si une partie de cette somme n’a pas, au travers de complexes montages financiers, servi au final à rémunérer un responsable libyen.

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Contacté par l’AFP, un des avocats de Total, Me Jean Veil, a indiqué que le groupe n’avait aucun commentaire à faire à ce stade. Me Dominique Penin, qui défend M. Takieddine, n’a pas non plus souhaité s’exprimer.

A l’origine de cette instruction, les investigations menées -déjà par MM. Van Ruymbeke et Le Loire- sur le volet financier de l’affaire Karachi, dans lequel M. Takieddine est mis en examen.

Les deux magistrats du pôle financier de Paris ont mis la main dans cette enquête sur une masse de documents appartenant à l’homme d’affaires.

Plusieurs d’entre eux, révélés par Mediapart en 2011 et consultés par l’AFP, portaient sur son intervention en 2008-2009 dans les négociations libyennes de Total.

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A l’époque, le pétrolier français a des vues sur un important champ gazier libyen, le « bloc NC7 », dans le Bassin de Ghadamès (ouest).

En décembre 2008, Total est contacté par la North Global Oil & Gas Company (NGO), une société domiciliée au Liechtenstein qui indique avoir une option sur le bloc convoité par Total, et se propose de la céder au groupe français moyennant sa participation, à hauteur de 20%, dans le contrat qu’il conclura avec la compagnie nationale libyenne de pétrole (NOC).

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Si le nom de Takieddine n’apparaît pas dans les courriers de la NGO, c’est bien par lui qu’elle est « dirigée en réalité », estime la division nationale d’investigations fiscales et financières (Dniff).

Passeports du Belize et du Canada

En janvier 2009, Patrick Pouyanné, directeur de la branche « exploration et production » de Total, indique à la NGO que le groupe est prêt à lui acheter 100% des droits en question pour 140 millions de dollars. En précisant que cette somme ne serait versée qu’une fois le contrat avec la Libye bouclé.

Un protocole d’accord est conclu en août 2009 entre le patron de Total, Christophe de Margerie, et l’ancien président de la NOC, Choukri Ghanem.

Face à l’insistance de la NGO qui réclame un acompte de 20%, Total accepte en septembre 2009 de lui faire un premier paiement de 9,8 millions de dollars (7%).

Total ne finalisera cependant jamais le contrat avec la NOC. « La guerre en Libye, en 2011, a fait capoter le projet », avait indiqué en avril dernier un porte-parole de Total au Canard Enchaîné.

Sur commission rogatoire de M. Van Ruymbeke, la Dniff est parvenue à déterminer, selon un rapport consulté par l’AFP, que la NGO avait prévu de reverser 70 des 140 millions de dollars à Ormerod, une société créée en août 2008 aux Iles Vierges Britanniques.

Or, le bénéficiaire d’un des comptes bancaires d’Ormerod serait un Libyen de 37 ans résidant à Londres, détenteur de passeports du Belize et du Canada.

Selon la Dniff, cet homme a présidé l’Odac (Organization for development of administrative centers), une institution publique libyenne dont les avoirs avaient été brièvement gelés en 2011 par l’Union européenne du fait de sa proximité avec le régime de Kadhafi.

« Ces éléments tendent à prouver que des faits de corruption d’agent public étranger ont pu être commis à l’occasion de négociations de Total en Libye dans lesquelles est intervenu Ziad Takieddine au travers de la NGO », estime la Dniff.

Ces soupçons ont été relayés fin mars 2013 par M. Van Ruymbeke au parquet de Paris, qui a ouvert le 26 juin une information judiciaire pour « corruption d’agent public étranger, recel et complicité ».

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