Au Caire, un taxi sur le Nil pour fuir une circulation infernale
Les habitants du Caire sont tous d’accord sur un point: dans leur ville, la circulation est un cauchemar. Aussi, pour échapper aux bouchons et à la pollution, ils sont de plus en plus nombreux à se tourner vers le Nil.
Loin des klaxons et des boulevards asphyxiés par la pollution, de tout nouveaux bateaux-taxis font remonter le fleuve à leurs passagers dans le calme, et à une vitesse record.
« J’arrive au travail décontracté, pas stressé, pas nerveux », se réjouit Ahmed Amin, qui passait presque quatre heures par jour dans les transports avant de découvrir « Nile Taxi ».
Pendant les vingt minutes que dure le trajet de Maadi, dans la banlieue sud, à Ramlet Boulaq, au nord, le taxi fluvial passe devant des tours de bureaux et des villas de style Renaissance, assez rapidement pour que le regard ne s’attarde pas sur les déchets flottant dans l’eau ou les baraques délabrées parsemant les rives.
Pour 30 livres (3,3 euros) l’aller simple, le service est bien au-dessus des moyens de la grande majorité des Egyptiens, dont 25% vivent dans la pauvreté selon des chiffres officiels.
Mais c’est un soulagement pour ceux qui prennent des taxis classiques tous les jours pour presque la même somme, ou qui en ont assez d’être coincés avec leur voiture dans la circulation dantesque de la mégalopole de près de 20 millions d’habitants.
M. Amin, qui travaille pour une organisation internationale basée au Caire, affirme que le bateau a raccourci son temps de trajet d’environ 30%, « sans compter l’impact que ça a sur mon humeur ».
« Ma performance au travail est meilleure que lorsque je conduisais », affirme-t-il.
A quelques pas de l’un des arrêts du Nile Taxi, par une chaleur étouffante, la circulation est tellement paralysée que les motos sont montées sur les trottoirs et les chauffeurs de taxi ont arrêté leur moteur.
« Qu’ils prennent les bateaux. Franchement, je serais content d’avoir moins de clients si les rues étaient moins encombrées », dit l’un d’eux, Sayyed Ali.
Magdi Kirollos Ghali et Amr Aboul Seoud, les créateurs de Nile Taxi, voient dans le fleuve une chance de faire des affaires, de répondre au besoin de mobilité des Cairotes et d’alléger un peu la circulation automobile de l’une des villes les plus polluées du monde.
« Nous avons une très grande autoroute qui n’a pas été utilisée depuis des années et des années », dit M. Ghali à l’AFP.
Le Nil, qui prend sa source en Ethiopie et en Ouganda pour se jeter dans la Méditerranée, est l’artère vitale de l’Egypte. Le fleuve est utilisé pour la pêche, le tourisme et même le sport, mais son potentiel pour le transport de passagers en ville n’a pas encore été vraiment exploité, selon M. Ghali.
L’idée du Nile Taxi est née il y a environ six ans lorsque les deux hommes ont établi un projet de système global de transport sur le fleuve.
Leur vision revisitait le concept du Nile Bus, un système gouvernemental datant des années 1960, bon marché mais lent, pas toujours fiable et opéré par des bateaux inconfortables et bruyants.
M. Ghali, qui travaille dans le transport maritime depuis 2001, et son partenaire ont voyagé à travers le monde pour acquérir le savoir-faire afin de monter leur affaire.
Ils étaient sur le point de commencer à concevoir des bateaux fonctionnant à l’énergie solaire lorsque la révolte de 2011, qui a chassé Hosni Moubarak du pouvoir, a éclaté, les obligeant à tout suspendre.
Le soulèvement a été suivi par une recrudescence de l’insécurité et par une instabilité politique.
« Nous ne savions pas qui appeler ou quoi faire », dit M. Ghali.
Récemment, les choses restant « trop insupportables » sur la route, ils ont décidé d’aller de l’avant tout en modifiant leur plan d’origine, utilisant trois petites vedettes à moteur qu’ils possédaient déjà.
« Le trajet du bateau évite la partie la plus encombrée du Caire, qui est le centre-ville. Si ça marche, ça pourrait vraiment alléger la circulation », dit Cherif Youssef, un passager.
D’ici juillet, la compagnie prévoit de lancer d’autres bateaux à basse consommation pouvant transporter 15 personnes chacun. L’objectif est d’avoir 30 bateaux dans deux ans, pour transporter 15. 000 passagers par jour.
« Selon nos études, cela soulagerait le centre du Caire de 3% des véhicules », dit M. Ghali. « Ca n’a peut-être l’air de rien, mais pensez à combien de voitures cela ferait en moins ».
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