Ghana: lycée gratuit ou enseignement de qualité? Un débat sur fond d’élections

Andrew Ampedu est agent de sécurité dans la capitale ghanéenne. Avec son salaire, il n’est pas sûr qu’il aura de quoi offrir à ses enfants des études secondaires.

Ghana: lycée gratuit ou enseignement de qualité? Un débat sur fond d’élections © AFP

Ghana: lycée gratuit ou enseignement de qualité? Un débat sur fond d’élections © AFP

Publié le 2 décembre 2012 Lecture : 3 minutes.

« Si je n’en ai pas les moyens, je les enverrai au village pour travailler à la ferme », confie-t-il.

Il est le type d’électeur sur lequel compte Nana Akufo-Ado, leader du NPP (Nouveau Parti Patriotique, principal parti d’opposition) lors du scrutin présidentiel du 7 décembre.

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Le candidat fait aux parents une promesse de campagne alléchante: abolir les frais de scolarité au lycée. Ceux-ci peuvent atteindre plusieurs centaines de dollars et sont hors de portée de beaucoup de familles dans un pays où le salaire moyen est de 1400 dollars par an, selon la Banque mondiale.

Seulement 14% de la population va jusqu’au bout de l’enseignement secondaire au Ghana, selon des données du gouvernement.

Le président John Dramani Mahama, candidat à sa propre succession, pense que l’idée est bonne sur le papier mais pas réaliste pour l’instant, puisque le manque de moyens financiers pourrait avoir une incidence sur la qualité de l’enseignement, dans ce pays de 20 millions d’habitants.

Les électeurs trancheront, mais le débat de fond a le mérite d’exister, dans une région où plusieurs pays sont encore très instables politiquement.

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Avec les élections à venir, le Ghana, déjà considéré comme un exemple de stabilité en Afrique de l’Ouest, compte bien polir son image de démocratie sur la scène internationale.

La seconde puissance économique d’Afrique de l’Ouest, grâce à ses exportations d’or et de cacao, pourrait connaître une forte croissance dans les années à venir avec la production de pétrole qui a commencé en 2010.

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Mais beaucoup reste à faire en termes d’éducation, dans un pays où les professeurs sont parfois obligés d’enseigner dehors à l’ombre d’un arbre, à la campagne, faute de locaux, et manquent cruellement de moyens dans les villes.

Forte croissance dans les années à venir

La constitution ghanéenne garantit un accès gratuit à l’éducation, ce qui est vrai pour le primaire et le collège, mais les lycéens doivent dépenser de l’argent pour la bibliothèque, les uniformes et toute une liste de fournitures et de services payants.

Le lycée gratuit, « c’est réalisable, mais ça impliquerait évidemment de mettre de côté d’autres priorités », estime Franklin Cudjoe, directeur du centre IMANI, un groupe de réflexion ghanéen sur l’éducation.

M. Akufo-Addo, le chef du Nouveau Parti Patriotique, estime que cette mesure, qui pourrait être instaurée dès l’année prochaine, coûterait au total 770 millions de dollars à l’Etat pour les trois années à venir.

Et il compte sur les revenus du pétrole pour financer cette réforme. Le Ghana produit pour l’instant 86. 000 barils de brut par jour mais prévoit d’augmenter sa production prochainement.

Le président Mahama a rétorqué que c’était trop cher et que son parti, le NDC (congrès national démocratique) préférait se concentrer sur le développement de l’enseignement secondaire et la construction d’universités publiques.

Si le système éducatif est relativement bon au Ghana comparé aux pays voisins, selon une récente étude de l’UNESCO, la moitié des femmes et un tiers des hommes ne savent pas lire au Ghana, au terme de 6 ans de scolarité.

Au lycée-pensionnat Labone, dans un quartier d’Accra habité par la classe moyenne, l’année scolaire coûte 286 dollars pour un élève interne.

Pour Reginaldo Otoo, qui y enseigne les mathématiques, il est trop tôt pour parler de lycées gratuits dans un pays qui manque d?effectifs dans l’enseignement et d’infrastructures.

Lui qui accueille parfois 50 lycéens à la fois dans une salle de classe sombre au tableau abîmé, avec des rangées de bureaux couverts de graffiti, dit qu’il ne mettra pas ses quatre enfants dans cet établissement public, mais dans un lycée privé.

« On paie plus, mais on a plus de qualité en retour », estime M. Otoo.

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