Les Libyens découvrent l’art vidéo après 42 ans de sevrage culturel

Avec étonnement et plaisir, des dizaines de Tripolitains se sont bousculés pour découvrir une exposition d’art vidéo dans la vieille ville de la capitale libyenne: du jamais vu dans un pays privé de vie culturelle durant les 42 ans de pouvoir de Mouammar Kadhafi.

Les Libyens découvrent l’art vidéo après 42 ans de sevrage culturel © AFP

Les Libyens découvrent l’art vidéo après 42 ans de sevrage culturel © AFP

Publié le 11 novembre 2012 Lecture : 2 minutes.

A quelques pas du front de mer de Tripoli, des Libyens de tous âges ont profité de l’exposition « First glance », organisée à l’initiative d’une ONG libyenne, « The Arete Foundation for Arts and Culture ».

« Sous le règne de Kadhafi, l’art, la musique et les spectacles n’étaient pas considérés comme politiquement corrects », se souvient un visiteur, Abdessalem Fraj. Agé d’une quarantaine d’années, il n’avait connu que la Libye de Mouammar Kadhafi jusqu’à la chute du despote et sa mort en octobre 2011.

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« Les spectacles et les rassemblements populaires tournaient autour de l’éloge du colonel Kadhafi, de ses exploits et de la gloire de (sa) révolution », explique-t-il, soulignant que « les poèmes et les chants étaient dédiés au seul Guide de la révolution ».

De fait, les manifestations comme « First glance » étaient interdites du temps du Guide suprême. Le culte de la personnalité imposé par le dictateur déchu et les dogmes de sa pensée politique inscrits dans le « Livre Vert » dominaient la scène culturelle, étouffant toute créativité et esprit d’initiative.

« Malgré les talents dont regorge la Libye au niveau culturel et artistique, les créateurs n’ont pu ni s’exprimer ni s’épanouir durant les 42 ans de pouvoir de Kadhafi », confirme Salaheddine Al-Majerbi, un autre spectateur.

« Toute forme d’expression libre ou toute création qui sortait des sentiers battus était passible d’emprisonnement, voire de mort », ajoute-t-il.

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Les oeuvres projetées cette semaine ont été crées par des artistes originaires de 14 pays dont la Grande-Bretagne, la France ou l’Egypte.

Les vidéos réalisées à partir d’images abstraites jouent sur la lumière ou la superposition de photos, dont le mouvement crée l’illusion d’une dynamique.

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Neufs écrans ont été installés sur des sites historiques de la médina, représentant la diversité de la culture libyenne influencée par les civilisations romaine, phénicienne, turque et arabe.

Le choix du quartier populaire de la vieille ville permet de faire partager à un large public un support artistique qui n’exige pas de bagage intellectuel pour en saisir le sens et en apprécier l’esthétique, souligne Reem Gibriel, directrice exécutive de la Fondation Arete.

Suivant les flèches rouges tracées par les organisateurs, les visiteurs intrigués, venus de toute la ville, ont pu déambuler pendant deux jours d’un site de projection à un autre.

« Le but de cette rencontre artistique est de mettre en valeur l’art de la vidéo », a affirmé le président de la Fondation, Khaled al-Matawa, rappelant le rôle majeur joué par les vidéos tournées pendant la révolte de 2011.

« Ce support a permis de révéler au monde les affres de la répression de l’ancien régime et les différents (développements) du soulèvement populaire contre la dictature », a-t-il ajouté.

« Cette exposition est une occasion pour les habitants de se rassembler et de reprendre goût à la vie civile après le conflit vécu par la pays », se félicite Boubacar Mohamed, un étudiant vivant dans la vieille ville.

Pour Ahmed Tarhuni, un artiste photographe, il est temps maintenant « de promouvoir la scène culturelle du pays, à la lumière de cette liberté acquise après le conflit ».

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