Abdou Diouf: « L’Afrique est le futur de la Francophonie »
« L’Afrique est le futur de la Francophonie », clame son secrétaire général, Abdou Diouf, à la veille du premier sommet de la Francophonie à Kinshasa. Et il réfute l’idée que la France soit encore au centre de l’organisation aux 56 pays membres dont 30 sont africains.
« En 2050, d’après nos études, nous serons 715 millions de francophones dans le monde et 85% seront en Afrique », relève M. Diouf, dans un entretien à l’AFP.
La République démocratique du Congo (RDC) se présente comme le pays francophone le plus peuplé au monde, avec sa population de 69 millions d’habitants qui pourrait dépasser les 150 millions dans 40 ans.
« L’Afrique va être le futur de la Francophonie et l’Afrique centrale comptera pour beaucoup (. . . ) en raison de sa démographie et parce que nous espérons que les objectifs de scolarisation universelle seront atteints », dit M. Diouf.
Une scolarisation en français, bien sûr, mais en sachant « marier » les langues: tel est le credo de l’ancien président sénégalais qui aime citer la situation dans son pays natal: « Vous reprochez aux Sénégalais de parler ouolof, sérère, diola, mandingue, peul, soninké? Non! N’empêche que la langue de l’administration, de tous les jours pour la gouvernance, c’est la langue française ». Et d’insister: « Il ne faut pas opposer le français aux langues nationales, elles sont complémentaires ».
« C’est important non seulement pour la dignité et le respect de nos pays mais aussi pour des raisons pédagogiques: quand on scolarise l’enfant dans sa langue maternelle au cours des deux premières années, il s’ouvre plus facilement à la langue seconde, le français (. . . ) et ces élèves-là sont plus performants que ceux qui ont commencé dès le début en français ».
Pas question pour Abdou Diouf, en revanche, de s’attarder sur la polémique née récemment au Gabon quand le président Ali Bongo a annoncé son intention de favoriser l’usage de l’anglais. L’opposition gabonaise y a vu « un chantage » contre la France, en mesure de « rétorsion à ses critiques sur la gouvernance ». « Chaque pays a le droit de définir sa politique », tempère M. Diouf, s’avouant pourtant « gêné » par « ce tapage à quelques jours du sommet ».
Pas de « cour » autour de François Hollande
A Kinshasa, Abdou Diouf sait que la nouvelle politique africaine du président français François Hollande sera soupesée par tous, alors que la Francophonie apparaît à certains commentateurs comme un « club » de pays ayant intérêt à avoir des relations privilégiées avec la France.
« A entendre parler les gens, on a l’impression que le président français a une cour autour de lui, quand il y a une réunion de la Francophonie. Ce n’est pas cela du tout! », proteste-t-il.
« Est-ce un pêché que de vouloir avoir des relations privilégiées avec la France, une Nation quand même qui compte dans le monde? Ce n’est pas un péché mais la Francophonie, ce n’est pas cela! », dit M. Diouf. Plutôt une « coopération privilégiée » entre « des pays qui partagent la même langue et les mêmes valeurs » et se sentent « dans une connivence positive ».
« Les mots de +néocolonialisme+, +Françafrique+, je ne connais pas, j’ai toujours traité d’égal à égal », conclut l’ex-chef d’Etat de 77 ans, formé à l’Ecole nationale de la France d’outre-mer.
« La Francophonie n’a jamais mis la France au centre », soutient-il. « D’ailleurs, sur la photo de famille, c’est à chaque fois le président en exercice (du sommet) qui est au centre ».
Même si les clichés historiques témoignent que François Mitterrand se trouvait toujours placé au beau milieu du premier rang.
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