Tunisie: un nouveau chef à la Banque centrale après un mois d’imbroglio
L’Assemblée nationale constituante de Tunisie (ANC) a approuvé mardi la nomination à la tête de la Banque centrale de Chedly Ayari, une personnalité controversée liée au régime tunisien déchu, mettant fin à un mois d’un imbroglio qui a nourri la nervosité des acteurs économiques.
« La désignation de Chedly Ayari comme gouverneur de la Banque centrale est adoptée », a déclaré le président de l’ANC, Mustapha Ben Jaafar.
Les élus de l’opposition ont dénoncé dans la foulée les conditions du vote, 190 députés ayant voté alors que seuls 156 étaient présents au moment de l’appel au début de la séance. Le résultat a été par ailleurs serré, avec 97 voix pour cette nomination, 89 contre et quatre abstentions.
La candidature de M. Ayari, qui aura 79 ans en août, a été très critiquée par l’opposition et une partie de la coalition au pouvoir, en raison de son âge et de ses relations avec le régime de Zine El Abidine Ben Ali, le président tunisien renversé par une révolution en janvier 2011.
« Si nos objectifs sont la réduction du chômage, la réduction de la pauvreté (. . . ) il faut que la BCT oeuvre dans le même sens » que le gouvernement, a déclaré M. Ayari, promettant dans le même temps de garantir l’indépendance de la banque et la stabilité du dinar tunisien.
Ce docteur en économie a été notamment ministre du Plan à l’époque du père de l’indépendance Habib Bourguiba. Il a par la suite occupé des fonctions dans des institutions financières internationales, comme la Banque africaine de développement, avant d’être nommé sénateur par Ben Ali.
Cette dernière collaboration lui a valu de nombreuses critiques. Rached Ghannouchi, le chef du parti islamiste Ennahada qui domine le gouvernement, a reconnu cet écueil, mais souligné que la Tunisie avait besoin de ses compétences.
« L’Etat (. . . ) doit distinguer ceux qui trempaient jusqu’au cou dans la dictature et la corruption et doivent être jugés, et les professionnels qui ont eu des relations limitées avec la dictature », a-t-il écrit sur sa page Facebook.
Dans les tribunes réservées aux spectateurs à l’ANC, certains ont brandi mardi des affichettes proclamant « Dégage » à l’attention de M. Ayari, reprenant le célèbre slogan révolutionnaire qui s’adressait à Ben Ali.
Le limogeage fin juin du gouverneur de la Banque centrale, Mustapha Kamel Nabli, a déclenché une longue joute entre le gouvernement et l’opposition qui accuse les autorités de vouloir contrôler l’institution.
Des vices de forme et maladresses de la part de la coalition au pouvoir –Ennahda et deux partis de centre-gauche– ont attisé la polémique la semaine dernière.
Cet imbroglio a par ailleurs été vivement critiqué lundi par l’agence de notation Moody’s, qui doit décider prochainement de dégrader ou non la note de la dette souveraine tunisienne.
« Le limogeage de M. Nabli (. . . ) va continuer d’ébranler des investisseurs qui sont déjà nerveux à la suite de la révolution de l’année dernière », a indiqué Moody’s.
M. Nabli était considéré comme un farouche défenseur de l’indépendance de la BCT et un opposant ferme au recours à « la planche à billet ».
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