Niger: en pleine crise alimentaire, la chasse à la malnutrition infantile

Boubacar sort son mètre et mesure le tour de bras de frêles bambins du village reculé de Tiss, dans le sud-est du Niger: cet humanitaire ratisse la zone pour combattre la malnutrition infantile, au moment où le pays subit le choc d’une nouvelle crise alimentaire.

Niger: en pleine crise alimentaire, la chasse à la malnutrition infantile © AFP

Niger: en pleine crise alimentaire, la chasse à la malnutrition infantile © AFP

Publié le 13 juin 2012 Lecture : 3 minutes.

Avec son collègue Jarjussou, qui travaille comme lui pour l’association nigérienne Befen (« Bien-être de la femme et de l’enfant au Niger »), financée par l’Union européenne et l’ONG française Alima, Boubacar Halirou vient de dépister trois enfants souffrant de malnutrition « sévère » et six cas « modérés » dans ce village aux maisons de terre séchée, à 10 km à l’ouest de la grande ville de Zinder.

Alors qu’un enfant sur quatre n’atteint pas l’âge de cinq ans dans ce pays parmi les plus pauvres du monde, plusieurs dizaines de mères se retrouvent dans un coin ombragé sur la place du village inondée de soleil pour faire examiner leurs enfants. Autour d’elles, des voisins devenus agents « communautaires » pour Befen.

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Il n’est pas toujours facile de se faire accepter. A la médecine moderne, « il y a des gens qui préfèrent les traitements traditionnels », explique à l’AFP Boubacar, la quarantaine et l’allure tranquille.

Les agents de l’association remettent un papier aux mamans dont les enfants sont malnutris: elles auront à emmener leurs ouailles au centre de soins le plus proche.

Mais certains villages de la zone se trouvent à 20 km du premier centre. Un aller-retour qu’il faudra faire à pied. C’est « un de nos plus grands soucis », souligne Boubacar, qui trouve ces mères « courageuses ».

Pour tenter d’y remédier, Befen a créé 17 centres de soins dans le secteur, comme celui de Tirmini, où Boubacar et Jarjussou arrivent après quelques minutes en 4×4 sur des pistes sablonneuses.

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Là, Rabi, 18 ans, visage encadré d’un voile, raconte d’une voix timide que son enfant « a d’abord eu de la diarrhée et des vomissements, avant de tomber dans la malnutrition. « 

« une chance de survie de 99% »

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Les enfants pleurent, sont auscultés les uns après les autres. Les mères attendent, anxieuses, assises dedans et dehors sur des nattes.

Les enfants les plus atteints reçoivent après consultation du « plumpy nut », une pâte qui est un mélange de sucre, d’arachide, de poudre de lait et de vitamines, et se conserve facilement, même par grande chaleur. Les mères glissent dans un foulard des rations pour une semaine.

« Je pense que mon enfant va retrouver la santé », respire Rakia, 28 ans, un autre bébé au dos. Venue pour la première fois, elle refera le déplacement dans quelques jours avec d’autres femmes de son village, pour éviter de marcher seule en pleine brousse.

Mais la malnutrition sévère s’accompagne souvent de complications, paludisme, pneumonie ou infections respiratoires.

Les cas les plus sérieux sont envoyés au centre de soins intensifs de l’hôpital de district de Mirriah (30 km à l’ouest de Zinder), qui travaille avec l’ONG nigérienne.

La période de juin à septembre est d’ordinaire – et encore plus en pleine crise – la plus difficile sur le plan des réserves alimentaires, juste avant les nouvelles récoltes, et donc la plus intense pour le centre, qui peut alors accueillir jusqu’à 200 enfants.

Cependant, se félicite un médecin, « les enfants qui viennent ici ont une chance de survie de 99% ».

En 2011, Befen avait pris en charge 2. 086 enfants dans cette zone. Cette année, avec la crise alimentaire qui s’accentue et menace selon l’ONU six millions de personnes au Niger sur 18 millions dans tout le Sahel, les chiffres sont en hausse de 10 à 15%.

Sur la route du retour vers son bureau à Zinder, le docteur Hamidine Illa, responsable local de l’association, rêve à haute voix. Il songe à un suivi de l’enfant « depuis la conception, et pendant 1. 000 jours », soit à peu près jusqu’à l’âge de deux ans, la phase de plus grande vulnérabilité des enfants.

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