Angola: Manuel Vicente, ex-patron du pétrole et possible héritier du pouvoir
Homme fort pendant douze ans du secteur pétrolier angolais, Manuel Vicente, ministre d’Etat depuis février, fait de plus en plus figure de possible héritier du pouvoir en Angola, au grand dam des caciques du parti présidentiel qui pourraient vouloir sa chute, selon des analystes.
En août, la presse avait déjà avancé le nom M. Vicente, 56 ans, comme dauphin désigné du président Jose Eduardo Dos Santos qui aura 70 ans en août et est au pouvoir depuis 1979.
Mais le parti présidentiel, le Mouvement pour la libération populaire de l’Angola (MPLA) qui gouverne depuis 1975, avait immédiatement démenti.
La récente nomination de M. Vicente à la tête d’un super-ministère de la Coordination économique, créé de toutes pièces, est cependant revenue accréditer la thèse selon laquelle Dos Santos le veut comme successeur.
Fidèle à une réputation de discrétion qui en fait l’un des hommes influents du globe les moins photographiés, l’intéressé n’a fait aucune apparition, ni déclaration publique depuis son entrée au gouvernement.
Mais son nom est au centre des discussions politiques. Et l’on parle de lui comme futur numéro deux sur la liste du MPLA aux prochaines élections générales, qui devraient se tenir en septembre.
Ingénieur de formation et patron depuis 1999 de la Sonangol, la compagnie publique qui gère l’importante manne pétrolière de l’Angola, deuxième producteur africain, M. Vicente a un profil atypique.
Dans un pays marqué par 27 ans de guerre civile, de 1975 à 2002, il n’a fait carrière ni dans l’armée, ni dans l’appareil du MPLA qu’il a rejoint tardivement.
En février, le président l’a propulsé secrétaire du bureau politique.
Accusé de ne pas connaître les dossiers politiques, il tire sa force de ses liens personnels avec Dos Santos.
Il est le parrain de sa fille aînée Isabel, passionnée d’art mais aussi femme d’affaires (elle est notamment propriétaire de la société de téléphonie mobile Unitel) et selon la presse, la belle-mère de Vicente est une soeur du président.
Avoir un tel allié comme successeur permettrait à Dos Santos d’effectuer une fausse sortie et de rester indirectement au pouvoir, à la manière d’un Vladimir Poutine, estime la politologue angolaise Paula Roque de l’université d’Oxford.
« Manuel Vicente sera le Medvedev de Dos Santos », prédit-elle. « Vicente permettra à Dos Santos de gouverner indirectement même s’il s’en va, préservant les intérêts de sa famille et de l’élite militaire et politique, et servant d’important tampon entre lui et l’aile réformatrice du parti ».
La Constitution angolaise permet en théorie à Dos Santos de se maintenir jusqu’en 2022 mais selon Mme Roque, le président redoute de finir comme son ex-homologue, feu le président zambien Frederick Chiluba, poursuivi par son parti pour corruption après son départ en 2001.
Formé à l’université Agostinho Neto de Luanda, à Londres et aux Etats-Unis, M. Vicente est issu de la classe moyenne de la capitale angolaise des années 1950.
Entré à la Sonangol en 1981, il a passé quatre ans dans un département d’études au ministère des Pétroles, pour revenir en 1991 comme vice-directeur général de la Sonangol, dont il a été nommé président par décret en 1999.
A l’étranger, il jouit d’une image de bon gestionnaire auprès des pétroliers comme Chevron, BP, ExxonMobil ou Total et de pays arabes producteurs d’or noir.
Il a cependant attiré l’attention des autorités américaines après des critiques du journaliste et militant anti-corruption angolais Rafael Marques.
Selon M. Marques, la chute de Vicente pourrait être aussi rapide que son ascension, jalousée au sein même du gouvernement.
« Pour le moment, Dos Santos se sert de lui pour gérer l’argent de la Sonangol et des affaires à l’étranger. Mais il n’a pas encore le soutien du MPLA et des autres ministres », prévient-il.
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