Sénégal: la route vers « l’émergence » parsemée d’embûches, dont la pauvreté

En douze ans de pouvoir, le président sénégalais Abdoulaye Wade a « bien tenu » l’économie et beaucoup construit en particulier à Dakar dont il a changé le visage, mais il lui est reproché d’avoir privilégié les infrastructures de prestige au détriment de la lutte contre la pauvreté.

Sénégal: la route vers « l’émergence » parsemée d’embûches, dont la pauvreté © AFP

Sénégal: la route vers « l’émergence » parsemée d’embûches, dont la pauvreté © AFP

Publié le 23 février 2012 Lecture : 3 minutes.

« Le Sénégal est bien noté par les agences. C’est un pays qui emprunte sur marché international. C’est le résultat de la bonne tenue des finances publiques, la transparence et la crédibilité de notre économie », affirme Serigne Mboup, président des cadres du Parti démocratique sénégalais (PDS, au pouvoir).

« Il ne reste que deux ou trois années de travail pour finir de moderniser totalement ce pays et le placer définitivement sur la voie de l’émergence », a récemment affirmé le président libéral Abdoulaye Wade, 85 ans, qui a mis fin en 2000 à 40 ans de règne socialiste, et brigue dimanche un nouveau mandat.

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Selon des statistiques officielles, le budget de l’Etat est passé de 500 milliards FCFA (plus de 762 millions d’euros) en 2000 à 2. 377 milliards FCFA (3,6 milliards d’euros) en 2011 et le pays enregistre 4% de croissance annuelle depuis une décennie, contre une moyenne de 2,7% sur la période antérieure.

L’agriculture a connu une « progression significative de 21,1% » depuis 2008.

Les coupures d’électricité, à l’origine de violentes émeutes, ont presque disparu depuis fin 2011 avec la mise en place d’un plan d’un coût de 1,5 milliard d’euros pour « construire, louer ou réparer des centrales électriques » de 2010 à 2014.

Mais pour l’économiste Demba Moussa Dembélé, du Forum social sénégalais, « Wade a échoué sur les plans économique et social. Ce qui résume cet échec, c’est la formule Barça ou Barsakh (Barcelone ou la mort) avec des milliers de jeunes sans emplois ou sous-employés » prêts à partir à l’étranger ou mourir sur des pirogues.

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Selon lui, « l’augmentation du budget de l’Etat s’est faite sur le dos des populations avec des taxes indirectes qui en constituent la source principale ».

Le « clinquant » de Dakar

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Pour l’ex-Premier ministre socialiste Mamadou Lamine Loum, la politique de « Wade a fait des millions de pauvres laissés en rade dans la distribution des richesses ».

Depuis 2000, « à cause de la corruption, les élites se sont enrichies. Les industries comme les ICS (Industries chimiques du Sénégal), alimentaires et textiles ont disparu où sont sur le déclin. Celles qui étaient rentables comme les télécoms ont été vendues », affirme l’économiste et écrivain Sanou Mbaye.

En outre, dit-il, « le déficit budgétaire est de l’ordre de 6,7% et le Sénégal importe encore les 2/3 de son riz », aliment de base des Sénégalais.

« L’Etat du Sénégal a mis les bouchées doubles sur les infrastructures durables et de qualité, leur attribuant un rôle essentiel dans le redémarrage de l’économie », explique Marie Bâ, ministre à la présidence de la République.

Ainsi, Dakar a fait peau neuve avec de nouvelles route, des ponts et des échangeurs qui ont contribué à améliorer la mobilité dans une ville confrontée à des embouteillages monstres.

Le bilan de Wade comprend aussi une autoroute à péage entre Dakar et sa banlieue dont un premier tronçon a été inauguré fin 2011, ainsi qu’un nouvel aéroport international à Diass (42 km de Dakar) qui doit être inauguré fin 2012.

Un très controversé monument de la Renaissance, statue monumentale d’un coût estimé à plus de 15 millions d’euros, a été construit par la Corée du Nord à Dakar, en plus d’édifices culturels dont certains sont encore en chantier.

Pour les observateurs, ce sont là des réalisations faites pour la gloire et le prestige du chef de l’Etat. « Dakar c’est le clinquant » qui contraste avec la pauvreté à l’intérieur du pays, affirme l’économiste Demba Moussa Dembélé.

« C’est bon de réaliser des infrastructures mais à quel coût ? », s’interroge quant à lui Sanou Mbaye, en évoquant l’absence de transparence dans le financement de ces grands travaux.

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