En Casamance, après les promesses, on réclame la paix au président Wade
« Une paix définitive »: En Casamance, dernière étape dans le sud du Sénégal de la tournée électorale du président Abdoulaye Wade, les habitants doutent des promesses mais réclament toujours la fin de ce conflit oublié.
« Tout ce qu’on veut vraiment, c’est la paix. Avec la paix, le reste vient », plaide, sous couvert d’anonymat, un résident de Kabrousse qui dit n’être en faveur ni du gouvernement ni de l’opposition.
A deux semaines du scrutin présidentiel du 26 février, des milliers d’habitants de Casamance ont accueilli samedi le président Wade, qui a sillonné au pas de charge des principales routes de la région, enchainant meetings et rencontres.
De Cap Skirring, localité balnéaire où l’avion transportant le président a atterri à la mi-journée, jusqu’à Ziguinchor, importante ville de la région, en passant par Kabrousse, Oussouye, Bignona, les doléances des partisans de Wade portent surtout sur les oeuvres sociales et la paix.
La tournée s’est déroulée sous haute surveillance sécuritaire, avec un dispositif affecté à son long cortège de véhicules et le quadrillage de chaque localité où il s’est arrêté, dans cette région de forêts luxuriantes, « bois sacrés », mangroves, rizières.
Histoire de dissuader toute velléité d’action du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC) qui y a déclenché, en décembre 1982, une rébellion indépendantiste jamais éteinte, en dépit de nombreux accords avec le pouvoir central de Dakar.
Sur le terrain, des périodes d’apaisement relatif sont interrompues par des violences, avec des accrochages entre rebelles et militaires, braquages armés et, dernièrement, rapts de membres de forces de sécurité. Cette situation n’empêche pas des Occidentaux de fréquenter les zones touristiques, généralement stables.
A Kabrousse, devant le président Wade, le chef du village Alex Diatta invoque Emitaï, un dieu de l’ethnie diola, et celui d’Aline Sitoé Diatta, prêtresse née dans ce village et devenue figure de la résistance à la colonisation.
« Que Emitaï d’Aline Sitoé Diatta accorde une paix définitive à la verte Casamance et à tout le Sénégal », dit-il lors d’une cérémonie colorée.
A Bignona, dans une région abritant des bases du MFDC et ses chefs de guerre les plus radicaux, M. Wade lui-même admet avoir failli à sa promesse de ramener la paix. A son arrivée au pouvoir en 2000, il s’était engagé à résoudre le conflit « en 100 jours ».
« Ca fait des années que je cherche la paix en Casamance, en vain. Mais maintenant, je suis confiant que c’est pour bientôt. Nous sommes en discussion avec toutes les franges du maquis du MFDC qui sont aussi pour la paix », lance-t-il à la foule rassemblée Place Emile Badiane.
« Mais le chemin pour y parvenir peut être long », prévient-il, en annonçant un nouveau plan: « Désarmement, déminage et projets (DDP) », qui prévoit la mise en culture, après leur déminage, de près 100. 000 hectares de terres agricoles.
Le président ne donne pas de calendrier ni de budget, mais assure qu’il financera « à 100% » ces projets dans trois communes « pour que les rebelles quittent le maquis et viennent pour travailler ».
« Personne ne me reprochera de m’occuper de ces terres de Casamance », insiste-t-il à Ziguinchor, du haut d’un podium digne d’un concert de superstar, d’où s’échappent des chansons de campagne longtemps après le départ du cortège présidentiel pour l’aéroport.
Alors que s’estompent les slogans partisans et bruits de castagnettes, des Ziguinchorois se montrent sceptiques. « On attend de voir, on a déjà entendu assez de promesses », commente un jeune homme.
Le cortège présidentiel croise sur sa route quelques partisans de l’opposition. Des jeunes, qui brandissent une banderole « Ziguinchor a choisi son président: Macky Sall ». Ou des partisans d’un autre candidat qui dansent au son de « Faux! Pas forcé », morceau de rap contre la candidature de M. Wade qui brigue un troisième mandat à 85 ans.
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