Sénégal: les candidats à la présidentielle courtisent les confréries

Les influentes confréries soufies se voient plus que jamais courtisées par les candidats sénégalais, président sortant Abdoulaye Wade en tête, avec le début de la campagne électorale pour la présidentielle du 26 février.

Sénégal: les candidats à la présidentielle courtisent les confréries © AFP

Sénégal: les candidats à la présidentielle courtisent les confréries © AFP

Publié le 7 février 2012 Lecture : 3 minutes.

Alors que le Sénégal célébrait ce week-end l’anniversaire de la naissance du prophète, le président Wade s’est rendu dimanche dans la ville sainte de Touba pour y rencontrer le calife général des Mourides, Serigne Cheikh Sidy Moctar Mbacké.

Jeudi, Wade avait visité la ville de Tivaouane, où il s’était entretenu avec Serigne Mansour Sy, le calife des Tidjanes, l’autre grande confrérie du pays.

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Réunis au sein du Mouvement du 23 juin (M23), représentants de l’opposition et de la société civile mènent depuis des semaines le même genre de visites pour convaincre califes et marabouts.

Musulmans à 95%, les Sénégalais suivent un islam sunnite dominé localement par d’importantes confréries soufies, essentiellement Tidjane, Mouride, Qadiriya et Layenne.

D’origine arabe (Tidjane et Qadiriya) ou locale (Mouride et Layenne), ces confréries ont chacune leur ville (cité) sainte, leurs dignitaires et leurs disciples qui se comptent par millions.

Se consacrant en priorité aux questions religieuses, elles jouent aussi un grand rôle économique, culturel, et politique, agissant comme des régulateurs sociaux favorisant la cohésion nationale, dans un pays cité comme un exemple de stabilité depuis les indépendances en Afrique de l’Ouest.

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Les portraits de soufis affichés aux devantures de magasins ou sur les pare-brises traduisent cette influence sur le quotidien des Sénégalais.

Les confréries « aident à gérer les frustrations des populations face aux insuffisances de l’Etat » et contribuent « à tempérer les tensions politiques », explique le sociologue sénégalais Hadiya Tandian.

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Pour cette raison, l’Etat sénégalais « a donc toujours flirté avec les confréries » et tenté de s’attirer leurs faveurs, souligne M. Tandian.

Ceci est particulièrement vrai à l’approche de la présidentielle, une échéance politique capitale pour le Sénégal alors que l’opposition conteste au président Wade, 85 ans et au pouvoir depuis 12 ans, le droit de se présenter à un troisième mandat.

Pas de consigne de vote

Les califes des deux principales confréries Mouride et Tidjane ont appelé la semaine dernière à l’apaisement, aidant sans doute à faire baisser la pression après les violences qui ont fait quatre morts depuis la validation le 27 janvier de la candidature de Wade par le Conseil constitutionnel.

Les voix qui se sont jusqu’à présent clairement exprimées pour ou contre Wade ne sont le fait que de quelques marabouts et branches des Tidjanes, comme la famille Abbas Sall de Louga (nord-ouest), une partie des Niassen de Kaolack (centre).

Si le calife général des Mourides (très hiérarchisés sous l’autorité de leur calife Moctar Mbacké) ne soutient pas explicitement Wade, il a appelé, via son porte-parole, à reconnaître la décision du Conseil constitutionnel.

Le chef de l’Etat sortant, lui-même Mouride, a clairement affiché ces dernières années son appartenance à la confrérie, suscitant même la polémique après son élection en 2000 en s’agenouillant devant son marabout.

« En forçant le trait, on pourrait dire que les dignitaires Mourides seraient plutôt favorables à Wade, leur calife n’ayant pas contesté sa candidature », estime M. Tandian.

Les chefs Tidjanes (qui comptent plusieurs branches) seraient au contraire plutôt opposés à cette candidature, ayant pris leur distance avec un président trop associé au mouridisme.

Pour autant, « il ne faut pas s’attendre dans les prochains jours à une consigne de vote contre ou en faveur d’un candidat », souligne M. Tandian.

Surtout, le camp présidentiel, comme l’opposition, « comptent des partisans parmi toutes les confréries », rappelle le sociologue.

Et enfin, les « califes ont compris que leur mot d’ordre ne sera pas nécessairement suivi par les fidèles, comme c’était le cas dans le Sénégal d’autrefois ».

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